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COLLOQUES


L’ESPRIT LATIN SOUFFLE-T-IL ENCORE SUR LA PENSEÉ ?
Claude Simon, le retour aux choses latines mêmes

Anne-Yvonne Julien, Université de Poitiers


Comme le notait Lucien Dällenbach dès 1988, l’œuvre de Claude Simon, est une œuvre qui, à certains égards, est de celle qui, dans les années soixante, ont énoncé avec le plus de virulence la nécessité de faire table rase d’une culture humaniste, ancrée aux yeux de la postérité rousseauiste dans le socle d’une latinité législatrice. Tabula rasa, donc, d’une culture ayant échoué dans sa fonction de rempart contre la montée démente des nationalismes et de la barbarie nazie.

Mais alors, pourquoi une telle présence des lettres latines dans cette œuvre souvent iconoclaste ? Pourquoi tant de traductions-transcriptions des classiques latins, et à toutes étapes du parcours simonien : ce sont Ovide et Apulée au détour de La Route des Flandres (1960), César surgissant d’Histoire (1967), César encore et Lucain au cœur de La Bataille de Pharsale (1969), Virgile ou les élégiaques dans la texture paysagère des Géorgiques (1981). Simon n’a-t-il pas osé le réemploi ou le quasi réemploi de titres antiques par deux fois (La Bataille de Pharsale et Les Géorgiques) ? Et que dire de cet Orion aveugle (1970) où le lecteur est invité, sur fond d’errance new-yorkaise, à emboîter le pas au géant de Nicolas Poussin, l’un des artistes du XVIIe pour lequel l’esprit latin a sans doute soufflé le plus vivement, au dire de nombre de nos contemporains, et non des moindres… Nous chercherons à comprendre pourquoi Claude Simon n’a pas renoncé à ce qu’il nomme par la bouche du narrateur d’Histoire « le pouvoir ambigu, multiple » des « mots latins ». Tout se passe un peu comme si le romancier Nobel avait souhaité opérer un « retour à la chose latine même », dans une perspective où la culture est filtrée par le regard phénoménologique.

Nous verrons donc pourquoi Claude Simon tout en passant par le stade des humanités contestées, en particulier dans La Route des Flandres, retrouve dans Histoire et La Bataille de Pharsale la chose latine, avant de rencontrer à travers Les Géorgiques l’intertexte virgilien, sur un mode qui, loin d’être simplement citationnel, est le support d’une interrogation sur le sens profond du travail du poète de Mantoue, de sa suavitas, et plus largement de tout travail formel face au chaos d’un monde bouleversé.

Les Humanités contestées

La Route des Flandres (1960)1 peut se lire comme une déclaration d’échec généralisé de tout savoir : n’est-il pas question de façon récurrente dans ce roman du peu de fiabilité du savoir stratégique ? Le récit mémoriel du personnage-narrateur Georges, en prise sur le traumatisme de mai 1940, fait en effet entendre, par instants, un discours très critique contre l’incurie des gradés ayant mis les régiments de cavalerie, auxquels il est censé avoir appartenu, dans la situation absurde d’avoir à répliquer à des blindés allemands. Le savoir philosophique n’est pas mieux doté : le narrateur confronté à la souffrance et au spectacle de la mort répétée d’autrui ne semble pas avoir expérimenté l’exercice de la pensée comme un recours possible au milieu de la débâcle. Ainsi se voit-il songer dans le wagon de prisonniers qui l’emmène en captivité en Allemagne : « Mais il n’était pas dans ses intentions de philosopher, ni de se fatiguer à essayer de penser ce que la pensée était incapable d’atteindre ou d’apprendre, car le problème consistait plus simplement à essayer de dégager sa jambe » (RF, p. 70).

Manière de dire que face à l’horreur, il n’y a guère de discours en forme qui puisse tenir. Et encore moins celui qui se prévaut de la tradition, de la transmission des témoignages de l’esprit, de tous ces remparts que l’humanité prétend avoir édifié pour affronter ce qui chez l’homme est du côté de la nature prédatrice. Qu’il suffise de se souvenir de l’un des dialogues-clés de La Route des Flandres (1960), d’ordre épistolaire entre le père de Georges, philologue impénitent, abîmé dans la déploration du bombardement de la bibliothèque de Leipzig et le fils prisonnier en Saxe, disant sa rage contre les prétendus « héritiers » et en appelant aux seules « valeurs sûres » : « chaussettes, caleçons, lainages, savon, cigarettes … » (RF, p. 211)

A l’évidence, Simon, par la voix du personnage-narrateur, mène une lutte contre tous les idéalismes, idéalismes héroïque, sentimental, juridique… Après tout, ce discours ironique n’était, en leurs temps, étranger ni à Céline ni à Sartre2. Dans ce contexte, les belles lettres latines ne sont pas épargnées, mais elles sont atteintes à travers divers filtres superposés : il en est ainsi indirectement question lorsque Georges et l’ami Blum évoque la figure de l’ancêtre De Reixach, droit sorti du siècle des Lumières, imaginé en lecteur des vingt-trois volumes de l’œuvre de Rousseau, gorgé de cette « prose [...] idyllique et fumeuse » (RF, p. 79) où, on le sait, le paradigme romain, surtout du côté des textes philosophiques et politiques, est plus qu’opératoire.

Rien d’étonnant donc à ce que lorsque point la référence latine, la couleur burlesque domine ; ainsi voit-on Georges se revoir dans l’espace peu respirable du wagon à bestiaux qui le mène en captivité et s’entendre plaisanter sur le motif de la blessure de guerre, tout en constatant le tour puissamment animal pris par l’assaut subi : « encore que je ne sois même pas sûr de pouvoir me vanter plus tard de quelque chose d’aussi glorieux que d’avoir été blessé par un de mes semblables, parce que ça devait être plutôt quelque chose comme un mulet ou cheval » (RF, p. 94) ; d’où la référence grinçante à Ovide, « il me semble que j’ai lu quelque part une histoire comme ça, des types métamorphosés d’un coup de baguette en cochons, ou en arbres, ou en cailloux, le tout par le moyen de vers latins… » (RF, p. 94) Reste que rien n’est sans ambiguïté en territoire simonien : si le sarcasme perdure, il se modère, le fils étant censé ajouter à l’adresse mentale du père philologue : « pensant encore « Comme quoi il n’a donc pas entièrement tort. […] Il faudra que je le lui dise. Ça lui fera plaisir. Je lui dirai que j’avais déjà lu en latin ce qui m’est arrivé… » (RF, P. 94). Le lecteur sourit, mais devrait méditer : « avoir déjà lu en latin ce qui vous arrive », ce n’est pas rien : un tel énoncé dit à la fois la genèse d’une formation intellectuelle, le dépôt du passé dans l’advenue du présent, la part de reconnaissance de toute expérience inédite et le vecteur sensoriel de toute culture.

La latinité perdue et retrouvée : Histoire (1967) et La Bataille de Pharsale (1969)

Sans doute est-ce avec Histoire puis La Bataille de Pharsale3 que Claude Simon fait la plus subtile démonstration des raisons qui sont les siennes de valoriser, envers et contre tout, au cœur de sa propre œuvre, la présence de la latinité, et ce au moment où il aborde la part la plus expérimentale de sa production, celle des années soixante-dix qui le voit se porter, surtout à partir de 1969, vers un effort extrême de construction scripturale, rompant quasiment avec toute continuité narrative résiduelle.

A priori, Histoire prolonge la réflexion amorcée dans La Route des Flandres sur le statut même de ce qu’on nomme l’Histoire, dans une tonalité plus sourde, globalement moins rageuse, et sur un mode mémoriel plus syncopé. S’énonce en effet ici les réticences simoniennes face à une vision épique de la succession des générations et de leur prétendue participation à la grande Histoire… Partout, ce qui surgit autour du personnage narrateur venu régler dans sa ville d’origine des questions financières d’urgence et vider la vieille demeure de famille, c’est la poussière ou la certitude de l’effritement d’un monde autrefois intime, aux couleurs funèbres et, à bien des égards, éprouvé comme mortifère : chuchotements des voix d’aïeules en allées, odeurs des fleurs entêtantes autour du cercueil de la mère, échos des « lamentations » anciennes et des « histoires d’hypothèques » qui se murmuraient au salon, manifestations diverses de ce que Simon nomme « un espace grisâtre et un temps grisâtre » (Hist. p. 140). Et de cet amas de cendres émergent, traversées par des visions fulgurantes de combats de rues dans le Barcelone de 1936, les souvenirs de versions latines faites sous l’égide d’Oncle Charles, dans la pénombre du bureau au papier verdâtre et moisi. L’oncle Charles, rappelons-le, pose ici pour l’aîné protecteur, éducateur à la sévérité feinte, gardien d’un quotidien en péril, et en dépit d’une allure d’éternel étudiant sage, amant trahi, et à ce titre, double manifeste du personnage-narrateur. A travers le filtre de la fiction, un pan de la mémoire auctoriale, à l’évidence, transparaît. Or Histoire propose, sur fond de mémoire de l’adolescence, une double approche de l’univers du latin, l’une et l’autre, associée à la figure avunculaire : d’un côté, le souvenir du mot à mot de la version du soir, en l’occurrence, déroulé laborieux du De Bello Civili de César et de son impeccable narratio (Hist. p.128-129), de l’autre, le parfum subversif de L’Âne d’or d’Apulée (environ 123-environ 170) dérobé à la bibliothèque de l’oncle fin lettré, dans le but d’épater Lambert, le copain frimeur ; mouvement réglé des cohortes romaines, donc, contre transports érotiques débridés de couleur animalière :

respirant l’odeur poussiéreuse et fade des pages du dictionnaire aux coins rebroussés et pelucheux à force d’avoir été tourné d’un doigt léché, cherchant les joues en feu (la respiration pressée haletante de la phrase les participes présents se succédant, se pressant, s’accumulant, le souffle court, brûlant, lacinia remota impatientiam mae monstrans : relevant le pan de mon vêtement , me troussant, lui dévoilant, lui montrant, disant vides jam proximante vehementer intentus, regarde je le membre d’âne dressé douloureux aveugle insupportable oppido formoso ne nervus) le doigt courant de haut en bas sur les colonnes, les pages jaunies… (Histoire, p. 108).4

On aura noté que le Gaffiot lui-même est, dans cet extrait, doté d’une vertu quasi érogène, l’apprenti latiniste entretenant avec son outil de travail une relation très tactile, et que, de plus, l’écrivain se plaît à mimer le tempo précipité des participes présents dont tant d’épisodes sensuels de ses fictions seront ponctués. Sans doute ces séquences mettent-elles en évidence chez l’écrivain une séduisante vis comica : comment le lecteur ne sourirait-il pas devant la fébrilité du garçon se délectant de la chevelure flottante de Photis « laeta proximat rosa certa renudata crinibus dissolutis accourant couronnée de roses joyeuse toute nue sous sa chevelure dénouée5 » (Hist. p.113) et bloquant ferme sur le pesant pensum césarien : 

oncle Charles enlevant à la fin ses lunettes, posant le livre de textes sur son bureau, disant sans élever la voix. Est-ce que tu ne crois pas que tu pourrais au moins faire semblant de la préparer avant de venir me dire que tu n’y comprends rien ? puis se taisant, m’écoutant protester et bredouiller jusqu’à ce que ma voix s’arrête d’elle-même […] Mais je me suis peut-être mal exprimé ; disons pendant combien de temps as-tu fait semblant de faire semblant ? » (Hist. p. 47)

Pourtant cette double polarité latine, sous les signes respectifs de l’ordre austère du stratège et de la fantaisie brillante du rhéteur, est elle-même précaire. Indubitablement, « la chair est triste, hélas… » : des éclats de désarroi amoureux et de deuil viennent piqueter de sombre les fragments d’Apulée ; au point que, de tous ces moments d’apprentissage, l’instance narratrice, au terme de vagues successives d’illusions perdues, semble ne plus pouvoir extraire que des débris calcinés :

prêts à tomber, (les mots aurait-on dit, en une poussière de particules friables brunâtres de rouille qui semblaient s’échapper des pages du dictionnaire en même temps qu’un impalpable et subtil relent de cendres, comme le résidu, les indestructibles décombres de ces villes anéanties par quelque séisme, l’éruption d’un volcan, la pluie de feu, et où les cadavres des couples enlacés subsistent intacts, momifiés, ardents, insoucieux, juvéniles et priapiques dans un désordre de trépieds, de coupes renversées, d’agrafes, de boucles de ceintures, de bijoux tombés des chevelures éparses - […] (Hist., p. 110).

Fin d’un décor familial en sursis, fin d’un amour de jeunesse marqué du sceau tragique, fin d’un monde occidental trop sûr de ses valeurs…tout est dit, on l’aura compris, par le biais de cette jonction entre imagerie pompéienne et sphère précieuse, ô combien reconnaissable, de l’élégie romaine. Simon ne travaille pas sur de simples souvenirs d’enfance, il montre comment un espace culturel, en l’occurrence le latin scolaire – ou bien, pour Apulée, le latin goûté en marge de l’institution - « se remplit », au sens que la phénoménologie a pu donner à ce verbe, de toute une expérience livresque et existentielle. Et il va de soi que la force de ces passages vient de l’accent porté sur le « remplissement » de l’objet « latinité ». L’allusion au monde de Tibulle ou de Properce n’est en rien ornementale, elle impose sa propre nécessité formelle : oui, les Latins ont dit quelque chose sur l’amour qui se défait et sur un monde irrémédiablement défunt, et les décors qu’ils ont forgés dans la poésie des premiers siècles ou l’imaginaire de la mort brutale que l’archéologie pompéienne a produit, relayé par tant de filtres littéraires à travers le temps, ont mis à notre disposition un vocabulaire esthétique dont l’écrivain contemporain peut user sans anachronisme. L’opéra, le théâtre, le cinéma et jusqu’au peplum sont d’ailleurs de la partie ! Et prêtons-y garde, Simon ne joue pas la carte de l’érudition, il ne préconise pas non plus une appropriation d’outils de pensée qu’il faudrait transposer dans une perspective intellectuelle actualisée ; d’ailleurs ses références sont plus poétiques que philosophiques. Sa démarche est plutôt de prendre acte du fait que cet ensemble de motifs, d’images, de visions échappées du domaine latin, lui est, à lui qui vit, dans et par l’écriture, déjà « propre », qu’ils informent son cheminement existentiel et son substrat linguistique, que ces mots appris, ces tropes, ces impressions esthétiques, sédimentent sa langue d’écrivain. Il y a là comme une genèse de cette culture originelle qui sous-tend la langue ; voici pourquoi il n’est pas vain d’évoquer un « retour » chez Simon « aux choses latines mêmes », voici pourquoi la référence latine ne se dissocie pas dans Histoire de l’évocation d’un vécu se déclinant en odeurs, bruits et couleurs, ou en résidus de souffrances nées du pouvoir laminant de l’eros. Est-ce un hasard si les mots latins eux-mêmes finissent, pour celui qui les entend en sa mémoire, par avoir la densité grave des objets rescapés de la poussière des siècles : « les mots semblables à ces coupes, ces peignes, ces aiguilles, ces bracelets de bronze ou de cuivre verdis un peu rongés, mais aux contours précis ciselés, que l’on peut voir dans les vitrines de ces musées, ces petites constructions à l’ombre de trois cyprès, installés sur les lieux mêmes des fouilles et où somnole un gardien dans le torride après-midi… » ? (Hist. p. 109)

Cette approche si singulière de la sphère « Latinité, » Simon va la prolonger dans le texte qui fera suite à Histoire, La Bataille de Pharsale, et oserais-je dire, la radicaliser. On sait que Claude Simon est de ces romanciers qui, sensible à la notion d’architecture globale d’une œuvre, dans le sillage de Proust, n’a cessé de faire fond sur des liens d’ordre intratextuels. Alastair Duncan, son éditeur et commentateur en Pléiade, met clairement l’accent sur ce parti-pris de montage continué : « Les romans de Simon sortent tous les uns des autres. Souvent des fragments, des images, des idées qu’il n’a pu placer dans l’un seront repris et retravaillés dans un autre »6. Or le romancier lui-même, à l’occasion d’un entretien datant de 1967, a précisé qu’il travaillait à repartir de l’épisode d’Histoire dévolu à « la version latine sur la bataille de Pharsale » pour en faire « l’embryon7 » de la nouvelle fiction. Ce point évidemment nous importe.

Mais comment la version latine refait-elle surface ? En réalité, le lecteur qui s’attaque à l’incipit de La Bataille de Pharsale peut être décontenancé car se succèdent sans ordre apparent des visions, imputables à une instance focalisatrice que l’on imagine d’abord unique, et dont le seul point commun réside a priori dans une dynamique d’élan : il a là un pigeon aux « ailes déployées », une cohorte d’individus surgissant d’une bouche parisienne de métro, le souvenir d’un tableau de combat naval entre Vénitiens et Génois, puis viennent une vignette de livre de catéchisme, l’allusion à un couloir ténébreux, que le lecteur du roman précédent identifie comme étant celui qui mène au bureau décrépi de l’Oncle Charles, et enfin le souvenir retranscrit, non des neiges d’antan mais des versions latines de naguère :

 Versions latines dont j’ânonnais le mot à mot comme une écœurante bouillie jusqu’à ce que de guerre lasse il finisse par me prendre le livre des mains et traduise lui-même :
César La Guerre des Gaules la Guerre civiles’enfonçant dans la bouche ouverte clouant la langue de ce. Latin langue morte
Eaux mortes. Mort vivant. Je comprends très bien que tu aies décidé de ne rien faire naturellement c’est de ta part purement et simplement une question de paresse… (BP, p. 17-18).

Cette fois encore, Simon ne dissocie pas univers latin et séances de version sous les lunettes réajustées de l’adulte légèrement impatienté. C’est si vrai que le seul fil directeur de type narratif subsistant dans la première section de ce roman, est celui qu’offre la relation discontinue d’un voyage en Grèce, entrepris dirait-on par le personnage-narrateur, dans l’unique but de vérifier la conformité entre le site de Pharsale en Thessalie et les descriptions du lieu escarpé où se déploient, d’après les carnets de campagne de César, à savoir le de Bello civili, les cohortes césariennes et celle de l’adversaire Pompée. Le lecteur un peu médusé est ainsi tenu en haleine par le récit d’une quête éperdue du site authentique d’une bataille, qui s’est déroulée en Grèce, l’été de l’an -48 av. J.-C. et qui, d’après les historiens contemporains aurait été l’occasion d’un affrontement des plus meurtriers pour le camp des Pompéiens. Dans son périple sur les routes cahotantes de Thessalie, le personnage est censé être accompagné d’un copain grec prénommé Nikos, qui se prête, avec une patience enjouée, à la recherche de cette nouvelle Toison d’or :

Est-ce que par hasard tu aurais de l’aspirine sur toi ou est-ce que tu peux te rappeler à quel endroit dans la voiture… Nikos fouilla dans la poche de sa chemise en extirpa un stylomine une note d’hôtel froissée la page arrachée d’un carnet de bord crénelé avec quelque chose griffonné dessus et une plaquette d’aspirine qu’il me tendit. J’en avalai deux coup sur coup Le second resta coincé dans ma gorge et je sentis le goût plâtreux et fade Et si tu demandais au patron de café peut-être qu’il saura quelque chose ? […] (BP, p. 26)

Le fil narratif s’interrompt, le temps d’accueillir la citation d’un morceau d’étude historique, en italiques, qui fait état de détails topographiques ainsi que du nombre très inégal des cohortes des deux armées à Pharsale8, puis le récit ponctué de dialogues rapportés reprend, mettant en scène les efforts du copain dévoué pour trouver l’introuvable site auprès du patron d’un café de village :

[…] Alors ? / Il dit qu’il y a eu une bataille contre les Turcs
Explique lui que c’était bien avant Dis-lui avant Jésus-Christ
Il traduisit Le patron écoutait avec une attention perplexe Il écarta les bras dans un geste d’impuissance prit les autres à témoin Ils nous regardèrent d’un air réprobateur (BP, p. 29-30)

Mais le renseignement quêté finit par advenir. Il convient de prendre « juste à droite avant d’arriver au poste Shell » ; au fond, quoi de plus simple ? Reste que le pauvre Nikos aimerait disposer de quelques traces résiduelles de l’Histoire, un peu de visibilité antique, tout de même…

tu crois qu’il y a quelque chose à voir ?
non dis-je Probablement des collines comme d’autres collines et une rivière comme d’autres rivières J’ai failli aussi crever dans un endroit où il n’y avait que des collines et une rivière comme partout ailleurs C’est toujours comme ça Mais c’est à cause de cette version
quelle version ? / je ne savais même pas que c’était par ici J’étais tellement cancre que…Mais si ça t’embête
il fit un geste insouciant de la main […] on est venus pour se balader pas pour faire des moyennes non ? (BP, p. 31)

Mais n’est-ce pas aussi « à cause de cette version »  que le roman aurait été écrit… Manière plaisante, on en conviendra, d’évoquer une gestation textuelle. Pourtant, cette fois encore, le propos simonien ne se veut pas simplement drôle. Il s’agit de faire concevoir au lecteur attentif quelle constellation de signes chaque sujet a la chance de porter en lui. Le discours de César déformé par un mot à mot désinvolte puis répercuté par la traduction parfaitement recadrée du tuteur est après tout « littérature », elle fut même conçue comme littérature de propagande c’est-à-dire fiction à vertu apologétique… On sait combien César a mis son pouvoir discursif de séduction au service d’une cause très peu juste et combien il a soigné son image de pacificateur vis-à-vis des contemporains et de la postérité. Nul hasard si, dans le roman de Simon, le premier extrait cité en latin du De Bello civili9 renvoie à cette image fabriquée d’un homme politique acharné à rechercher la paix (« pacem petisset », B.P. p. 43) mais contraint au choc par un adversaire prêt à mettre la terre latine à feu et à sang pour aller jusqu’au bout de ses visées personnelles.

Il n’empêche, l’écrivain suggère que ce discours antique, même maladroitement traduit, - ou parce que maladroitement traduit -, a été entendu par le protagoniste et s’est déposé dans les souvenirs d’un ego scriptor en puissance- dans la stricte mesure où il allait de pair avec un mode de réception dense d’ordre sensoriel ou émotionnel : c’est parce qu’il entre dans la texture de moments d’enfance identifiés (tristesse d’une maison envahie par le climat de la maladie, désir d’émancipation du garçon) puis de souvenirs adultes eux-mêmes identifiables qu’il traverse les couches plurielles des années. Peu à peu, le lecteur comprend que la désillusion du voyageur en perte de repères géographiques, vient de ce qu’il cherche à faire coïncider l’expression « bataille de Pharsale » avec un lieu fantasmé comme espace de l’héroïsme antique. Mais quelles présences peut-on répertorier aux abords de cette route de nulle part ? Des poulets maigrichons ? De quelle mêlée de corps athlétiques dispose-t-on ? De celle de joueurs de foot hurlant dans la caillasse ? Et le Mont Krindir, ces « montes altissimos » chez César ? « un simple renflement en forme de dos de poisson aplati »… Mimesis inopérante, assurément. Simon ne se contente pourtant pas de ce constat filtré par la voix d’un Nikos à la longue exaspéré : « de toutes façons qu’est-ce que ça peut faire cette colline ou celle-là ? » (BP, p. 88)  Ce qu’il suggère, c’est à quel point une identité se dessine en circulant sur les sentes du langage, lui-même médiatisé par le contexte de tel énoncé ou de telle bribe de phrase entendue en un espace défini du temps: ainsi le mot à mot du jeune cancre, confronté aux Commentarii est-il inepte au dire d’Oncle Charles :

dextrum cornu ejus rivus quidam impeditis ripis muniebat Je m’arrêtais
alors ?
rivus : une rivière
impeditis ripis : aux bords obstacles
des bords obstacles qu’est-ce que ça veut dire explique-moi
je me taisais
tu pourrais peut-être te donner la peine de chercher plus loin que le premier mot que tu trouves dans le dictionnaire […]
je me taisais
bon très bien  impeditis ripis : aux rives escarpées ça ne te semble pas mieux ? (BP, p. 51-52)

Il n’empêche, les balivernes du garçon, piètre latiniste, ont gagné en sens au contact de l’épreuve traumatisante de la guerre de mai 40 (« J’ai failli aussi crever dans un endroit où… »). Le lecteur, passé par La Route des Flandres (1960) sait que des « bords obstacles » est un mot valise non dépourvu de pertinence pour qui a vu certaine route aux environs de la Meuse, dont les bords étaient jonchés de cadavres de chevaux, de poussettes abandonnées, de carcasses de véhicules calcinées… A partir de là, le jeu d’associations peut se prolonger, sans arbitraire, - Simon a souvent précisé qu’il n’était pas roussélien -, au point que les représentations de batailles se succèdent, s’articulant les unes aux autres, s’entremêlant pour le lecteur. Les descriptions de tableaux d’Histoire, en particulier, envahissent certains pans du récit et le lecteur voit ainsi défiler, comme l’a montré l’étude fondatrice de Jean Rousset10, des images fragmentaires, La Défaite de Chosroès de Piero della Francesca (1452-1458)11, La Bataille de San Romano (1456) d’Ucello12, La Bataille de Guilboa (1562) de Breughel, ou un lavis de Poussin, La Victoire de Josué13 (1625). Mais il arrive aussi que des médiations plus triviales s’interposent, tout aussi efficaces dans le tracé de signification qu’elles induisent pour un ego patior. Parmi elles, le billet à l’effigie de César sorti, un soir de séjour de pèlerinage à Lourdes, de la poche grise cachée dans le corsage de la grand-mère : « Spectre blafard et shakespearien comme le fantôme le négatif pour ainsi dire de ce pondérable et sévère personnage qui contemplait le champ de bataille de Pharsale » (BP, p. 127) ; ou encore la silhouette tristement bouffonne d’un soldat aviné, nu et brandissant son sabre à tout-va dans le froid glacial et militaire d’une chambrée silencieuse, « dérisoire réplique de tous les Persée, les Goliath, les Leonidas, la cohorte des guerriers figés dans les bitumeuses peintures des musées… » (BP, p. 137) Et voici que le pilum des légions romaines, celui même qui défaisait le courage des plus brillants officiers de Pompée - car plus que la mort, le texte de La Guerre civile le souligne, ils craignaient la défiguration - voici que ce pilum prend un autre sens, il est l’arme sexuelle de l’âne bien loti d’Apulée, le pilon qui fourrage dans la matrice femelle depuis la nuit des temps et pour l’infinité des siècles et les guerriers farouches qui roulent dans la poussière sont tout à la fois soldats au choc et partenaires de chair au moins autant que dans le splendide « duellum » de Baudelaire14, auquel il est probable que le romancier ait songé  « - O fureur des cœurs mûrs par l’amour ulcéré ». Voici que le lecteur de Simon comprend qu’il lui est ici parlé de « furor », - ce mot qui résonne si fort dans La Pharsale de Lucain 15, et conçoit que si la langue prévoit des bipolarités sémantiques, c’est au fond qu’elle a soin de penser pour nous.

Les Géorgiques (1981) ou l’éloge de la suavitas

Avec Les Géorgiques16, polyphonique roman qui entrelace les destinées d’un général d’Empire, ancien conventionnel, dont le nom est lisible derrière les initiales LSM17, d’un cavalier du front de Flandres en mai 1940 et d’un engagé de nationalité britannique O. - initiale derrière laquelle il faut lire Orwell - auprès de certaines factions des Républicains espagnols, Simon franchit une étape nouvelle dans le dialogue qu’il entretient avec la latinité. D’abord parce qu’il ose, comme nous l’avons d’emblée souligné, le pur réemploi d’un titre, et quel titre ! Celui de l’un des chefs d’œuvre poétiques de la langue latine, unanimement reconnu comme tel depuis le premier siècle. Simon aurait-il jeté définitivement au panier sa vieille carte de néo-romancier ? Certes non, car il ne s’agit pas pour l’écrivain virtuose d’introduire quelques paramètres antiques dans un environnement qui serait celui de la jeune nation française à l’époque de la première République et du Consulat, de l’Espagne de la guerre civile ou de la France de mai 40. Ce que le roman accueille relève d’un travail de méditation éminemment poétique sur l’état de chaos profond d’un monde terrifié, en but à la force inassouvie de la pulsion de mort tapie derrière le masque de la guerre ou de ses déclinaisons. La cohorte de guerriers encore et toujours se remet en marche.

Dans La Bataille de Pharsale, le souvenir d’un texte latin et de mots latins se donnaient comme embrayeurs structurels d’une songerie syncopée sur les expériences destructrices de la guerre et de l’éros ; c’est d’ailleurs ce qui légitimait en partie le rapport marqué à Proust, au Proust généalogiste des passions, - celui qui prête par exemple au personnage de Saint-Loup du Temps retrouvé un discours sur le lien entre guerre et passion charnelle. Le roman Les Géorgiques se déploie encore à partir d’un schème structurel, défini cette fois sur un mode contrapuntique : guerre versus culture de la terre. Si le poème didactique de Virgile, soigneusement documenté, longuement mûri, va bien au-delà de sa visée première, il s’inscrit tout de même on le sait, dans un mouvement idéologique, augustéen, de réhabilitation de la vie agricole après les ravages occasionnés en territoire italique par le tumulte des guerres civiles. De ce point de vue, il est parfaitement cohérent que Les Géorgiques succèdent chez Simon à un ouvrage intitulé La Bataille de Pharsale. Mais le poème de Virgile est ici plus qu’un embrayeur ; sa présence, ses inflexions, ses accents se devinent courant sous la trame textuelle complexe tissée par Les Géorgiques secondes de Claude Simon.

A un tel principe d’interaction textuelle, l’éditeur de Simon, Jérôme Lindon, au moment de la parution du roman était très attentif, lorsqu’il évoquait, admiratif, le feuilleté du récit en ces termes :

Trois personnages luttant dans des époques tumultueuses, de gloire ou de désastre, sans pourtant que le fracas des bombes empêche les saisons de se succéder, les arbres de porter leurs fruits et les animaux de mettre bas selon une ordonnance immuable de la nature, cette nature qui est sans doute, comme le titre l'indique, le principal personnage du livre »18.

De fait, en tous points du texte, sont mis en regard le temps régulé de la nature et le désordre temporel violent de l’incident, de l’événement voire de la suspension d’une durée existentielle. Multiples sont les entrées de paragraphes qui affichent la ponctuation de la saison et de ses attributs. Quelques occurrences captées au hasard des pages : « [e]n septembre apparaissent les grosses araignées. Elles tissent leurs toiles scintillantes et polygonales d’une branche à une autre. » (G, p. 53) ; « il semblait que l’hiver ne dût pas avoir de fin, qu’il avait toujours été là… » (G, p. 105) ; puis un peu plus loin : « Mais la féérie scintillante l’embrasement glacé diamantin, couleur d’amandes et de roses, s’était éteint. Le ciel était simplement bleu à présent, sans un nuage, sans même de ces stagnantes écharpes vaporeuses, ces traînées qui semblent parfois laissées par quelque pinceau géant… » ; et  au chapitre suivant : « Un peu au-dessous du toit affleuraient les plus hautes branches des platanes de l’avenue, avec leurs tendres pousses printanières, leur feuillage d’un vert encore hésitant… » (G, p.301) A titre comparatif, inutile de citer tout Virgile, que l’on se souvienne simplement que chacun des quatre livres dévolus respectivement au labourage, aux arbres ou à la vigne, aux troupeaux et enfin aux abeilles est saturé de litanies d’indices saisonniers. Au dire du poète mantouan, il y a profit à se faire observateur- « observant », faudrait-il presque dire - du cycle naturel : « Nec frustra signorum obitus speculamur et ortus/ temporibusque parem diversis quattuor annum », L1, v. 257-258)19.

Mais ces considérations de rythmes saisonniers ne suffiraient pas en tant que telles à assurer le lien entre le texte contemporain et son homologue latin. Si le pli virgilien est imprimé à l’écriture du roman, il l’est d’abord par le truchement de la correspondance de LSM, archive simonienne insérée en pointillé dans la texture narrative. D’un côté le défilé des interlocuteurs les plus officiels de l’ancêtre (Comité de Salut public, Ministres de la guerre ou de la marine successifs, gouvernement du Directoire) et l’écume des décisions militaires ou administratives pour époques de tumulte ; de l’autre l’unique et inamovible Batti, l’intendante du domaine et les « instructions » les plus précises concernant telle plantation opportune, telle graine de luzerne à ramasser ou telle jument à faire saillir. Ce qui dans le discours prêté à l’oncle Charles devient « un véritable précis d’agriculture ». Or qui mieux que Virgile a fait la démonstration qu’un précis d’agriculture peut se confondre avec un art d’écrire, sans d’ailleurs que la visée didactique soit pour autant sacrifiée au propos littéraire ? Si les Géorgiques latins ont tant fasciné les poètes, c’est aussi qu’on y soupçonne un éloge du faire en territoire préalablement codifié et la célébration des mille combinaisons que favorise la maîtrise de la technique associée au travail et à la considération des propriétés d’un environnement reçu, comme peut l’être l’environnement linguistique. Qu’on songe aux belles analyses de Jackie Pigeaud sur l’esthétique virgilienne de la greffe20. Est-il si étonnant que l’écrivain-viticulteur Claude Simon ait recherché lui aussi ce jeu de rapprochement entre les arts, agricole et scriptural ?

Comment ne pas concevoir que LSM porte ici une part du projet simonien, celui qui consiste à « corrig[er], embell[ir], labour[er] » la langue, « [à] plant[er] par procuration usant non de charrues ou de herses mais de cette encre brune couleur rouille sur le papier grenu des innombrables lettres… » (G, p. 377) et que la valeureuse Batti en conserve peut-être une autre, elle que l’auteur imagine « s’efforça[nt] pathétiquement, le visage crispé de convertir en mots des prairies, des fossés, des jeunes plants, des poulains, des labours, des bois, des heures de marches, des chemins… » (G, p. 461). Peut-on dire plus clairement qu’aucun mot n’est vide de vécu, et surtout d’un vécu qui se transmet ? Une fois encore la voix de l’oncle latiniste résonne dans les dernières pages du roman alors qu’il conte au neveu l’étonnante mise au jour des correspondances de LSM : « [e]n tout cas vous avez quelque chose en commun : tu as fait toi-même la guerre sur un cheval. Ou plutôt, d’après ce que tu m’as raconté, subi », à quoi s’ajoute la remarque suivante : « Les chevaux. Avec le « Contrat social » et Virgile, il semble que c’ait été une de ses passions ». (G, p. 446). N’oublions pas qu’en exergue des Géorgiques se lit une phrase de Rousseau, extraite non d’un opuscule à visée politique mais de ce bréviaire de plénitude existentielle que peuvent parfois être les Confessions21.

Retour donc à travers Les Géorgiques de Simon aux choses virgiliennes mêmes, à cette combinaison si particulière de savoir rural et de chant sur lequel repose peut-être encore pour notre imaginaire culturel du XXIe siècle, un pan du mythe de « l’esprit latin fait poésie », et dont la suavitas, cette douceur et cette force non dépourvues de mélancolie, imprègnent incontestablement la phrase très contemporaine de Claude Simon. Latinité, on l’aura compris, quel que soit le volet concerné de l’œuvre de Simon, quel que soit l’auteur sollicité, César, Lucain, Virgile, Ovide, Apulée… habitée de l’intérieur, sentie, éprouvée dans sa dimension linguistique, son substrat légendaire, sa couleur tantôt de cendres tantôt de fruit mûr, sa vertu littéraire à la fois « donnée » et pourtant incontestablement forgée.


1 L’édition de référence est Claude Simon, La Route des Flandres, éd. Minuit, coll. « double », 1993 ; conformément à la nomenclature adoptée dans les Cahiers Claude Simon (dir. A. Y. Julien), Presses Universitaires de Perpignan, le titre du roman sera abrégé en RF.

2 A ceci près que l’écrivain n’épouse ni le pessimisme célinien d’esprit schopenhauerien, ni la valorisation sartrienne de la conscience critique…

3 Les éditions de référence sont Claude Simon, Histoire, éd. Minuit, 1993 (1967) et Claude Simon, La Bataille de Pharsale, éd. Minuit, 1985 (1969) ; les titres des romans seront abrégés respectivement en Hist. et BP.

4 Apulée, L’Âne d’or, traduction et notes de P. Grimal, préface J.-L. Bory, Gallimard, éd. « Folio classique », 2009 (1975).

5 Scène souriante d’ébats contée par Lucius et qui met l’accent sur la séduction de Photis, la jeune servante de ses hôtes thessaliens : «  Et aussitôt la vaisselle enlevée en un tournemain, Photis dépouillée de tous ses vêtements, cheveux dénoués dans une liberté joyeuse, s’étant miraculeusement rendue semblable à Vénus, lorsqu’elle sort des flots de la mer, et de sa main rosée, elle couvrait à demi son sexe épilé plus par coquetterie que par pudeur … », ibidem, p. 60-61).

6 Claude Simon, Œuvres, édition établie par Alastair B. Duncan, avec la collaboration de Jean Duffy, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », p. XXIX, 2006.

7 Madeleine Chapsal, « Entretien avec Claude Simon, « Il n’y a pas d’art réaliste », La Quinzaine littéraire, n°41, 15-31 décembre 1967.

8 « Pompée venu de Larissa avec 110 cohortes (117 selon César) et 7000 cavaliers avait établi son camp à l’Est sur les pentes du Karadja Ahmet César venu par l’O. avec 87 cohortes et 1000 cavaliers s’était campé à 5, 5 km à l’O. et au N. de la pointe du mont Krindir… » (BP, p. 27).

9 César, La Guerre civile, Paris, éd. Les Belles lettres, 1972.

10 Jean Rousset, « La Guerre en peinture : La Bataille de Pharsale » dans Passages, échanges et transpositions, éd. Corti. Je renvoie tout à la fois à cet ouvrage et aux commentaires éclairés de Brigitte Ferrato-Combe.

11 Fresque de l’église San Francesco d’Arezzo. Piero della Francesca (1416/17-1492).

12 Paolo Ucello (1397-1475).

13 Nicolas Poussin (1594-1665), La Bataille de Josué contre les Amalécites, (1625), Musée de l’Hermitage, Saint-Petersbourg.

14 Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, « Spleen et Idéal », « Duellum », introduction A. Adam, éd. Garnier, 1973 (1961), p. 39-40.

15 Mot qui résonne tout particulièrement au livre LVII pour stigmatiser l’intempérance césarienne : « Hic furor, hic rabies, hic sunt tua crimina, Caesar » (v. 551) dans Lucain, La Guerre civile (La Pharsale), volume 2, A. Bougerie et M. Ponchont Paris, éd. Les Belles lettres, 1993.  

16 L’édition de référence est Claude Simon, Les Géorgiques, éd. Minuit, 1981 ; le titre du roman sera abrégé en G.

17 Le conventionnel Le général Lacombe-Saint-Michel, ancêtre de Claude Simon, voir notice biographique, dans Claude Simon Œuvres, op.cit.

18 Editions Minuit, Dossier de presse des Géorgiques (1981).

19 Virgile, Géorgiques, bilingue, texte établi et traduit par Eugène de Saint-Denis, introduction et notes Jackie Pigeaud « Classiques en poche », éd. Les Belles lettres, 2009.

« Ce n’est pas en vain que nous guettons le lever et le coucher des constellations, et les quatre saisons différentes qui se partagent également l’année ».

20 Jackie Pigeaud, L’Art et le vivant, Paris, Gallimard, 1995.

21 « Les climats, les saisons, les sons, les couleurs, l’obscurité, la lumière, les éléments, les aliments, le bruit, le silence, le mouvement, le repos, tout agit sur notre machine, et sur notre âme, par conséquent », Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions, livre IX, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », Œuvres complètes, t. 1, p. 409.



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- Auteur : Anne-Yvonne Julien, Université de Poitiers
- Titre : Claude Simon, le retour aux choses latines mêmes
- Date de publication : 14-05-2012
- Publication : Revue Silène. Centre de recherches en littérature et poétique comparées de Paris Ouest-Nanterre-La Défense
- Adresse originale (URL) : http://www.revue-silene.comf/index.php?sp=comm&comm_id=114
- ISSN 2105-2816