Le syndrome de La petite fille aux allumettes

Valérie Cavallo
Université Paris 8
AIAC (EA 4010)

Citer
Valérie Cavallo, « Le syndrome de La petite fille aux allumettes », dans Revue Silène, Url : https://www.revue-silene.com/06_petite_fille_allumettes

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Sommaire

La réflexion que je propose de mener ici part d’un souvenir d’enfance et, notamment, de la réception du conte d’Andersen intitulé La petite fille aux allumettes,  à l’occasion d’une soirée de Noël. Or, si j’ai rapidement retrouvé l’ouvrage illustré qui préside à ce souvenir, je ne m’attendais pas, au fil de mes recherches, à effeuiller autant de versions et d’illustrations de ce conte, traduit dans plusieurs langues et diffusé en divers endroits du monde. Je ne m’attendais pas non plus à en déceler autant d’adaptations (au cinéma, au théâtre ou à l’opéra, voire en jeu vidéo), souvent judicieuses, mais parfois aussi abusivement édulcorées.

La portée de cette histoire semble donc avérée, et s’il est possible d’en étendre largement la thèse introduite ici – à savoir l’idée que ce conte, écrit au milieu du XIXe siècle, induit un sentiment de trouble –, c’est effectivement parce que le récit qui s’y déroule est symptomatique de conditions existentielles et sociales déterminées par l’accès au travail et l’obtention de moyens pécuniaires, comme le soulignent les travaux de Georg Simmel1. Sous couvert de bonne conscience et de spiritualité, la période de Noël étant devenue dans le monde entier un moment de consommation paradigmatique, dont l’abondance et le luxe contrastent de façon criante avec la misère de ceux qui « n’ont » rien, il est ainsi pour le moins désarmant qu’un écrit issu des temps de l’industrialisation soit encore en mesure de pointer une situation d’extrême pauvreté, animée de tentatives de compensations affectives, à l’heure des « joyeuses fêtes » obligées.

D’où l’importance de comprendre quel en est le contexte, comment le récit se structure et se déplace entre textes et images, et enfin de quelle manière les adultes le présentent, depuis le texte original et ses premières traductions et illustrations, jusqu’aux formes narratives d’aujourd’hui. Pour cette raison, cette analyse abordera trois directions. La première questionnera la réception de ce conte en fonction de la construction d’une image archétypale ; la deuxième tentera d’analyser le malaise dont témoigne et que provoque cet écrit ; la troisième, enfin, évoquera la transformation de l’histoire contée par Andersen, suivant diverses adaptations du XXe siècle jusqu’aux mutations les plus récentes.


Une expérience première

Lorsque j’étais enfant, mes grands-parents m’offraient pour Noël des livres de contes illustrés, qu’ils déposaient au pied du sapin, soigneusement emballés de papiers étoilés. Pendant les longs repas de fêtes, je n’ouvrais pas ces ouvrages. Il fallait attendre la permission de sortir de table pour en observer la couverture et éventuellement poser le doigt sur les rehauts brillants qui parsemaient les images aux paysages enneigés ponctuant l’intérieur de ces albums. À distance des discussions des adultes, le merveilleux opérait alors en autant de petites fenêtres chaleureuses et de bougies lumineuses ornant des récits que je découvrais de prime abord par leurs iconographies, puis dont je parcourais les mots, sortes de « flocons de neige sonores s’entremêlant aux images2 », pour le dire avec Walter Benjamin quand il évoque les livres pour enfants.

Parmi les albums qui m’étaient offerts, je me souviens qu’un conte d’Andersen m’avait bouleversée. La narration situait une petite fille, seule, pieds nus, dans le froid de la rue, précisément un soir de réveillon du jour de l’an. Pour se réchauffer, elle frottait l’une après l’autre des allumettes, dont la flamme l’emmenait dans l’imaginaire d’une vie meilleure, opulente, chaleureuse et festive. Mais les visions de la fillette durent le temps de quelques étincelles et, au matin, celle-ci est retrouvée morte sous la neige…

De cette lecture, j’ai longtemps gardé un sentiment étrange qui revient chaque Noël, avec précisément le souvenir de l’illustration pleine page qui en symbolisait l’histoire, à savoir : l’apparition d’un sapin éblouissant, presque irréel, et à son pied, une enfant en haillons, aux cheveux dorés et au regard extatique, face à l’inaccessible.

Cette expérience, à l’instar de bien des enfants découvrant ce conte, est en partie explicable par le caractère fondateur des lectures illustrées du plus jeune âge, notamment dans la mesure où l’accès à l’écrit se fait en même temps que celle de figures et de paysages, par lesquels s’élabore tout un imaginaire qui leur reste attaché. Walter Benjamin, citant lui-même Andersen, en saisit l’impact, « à la « traversée » dit-il par « l’œil et le doigt », d’une « scène où vit le conte »3. Or ici, la scène est à la fois merveilleuse et gage d’une réalité difficile. Elle invite le lecteur de l’histoire autant à s’émouvoir des vitrines scintillantes et des apparitions fabuleuses provoquées par le frottement des allumettes, qu’elle amène à vivre le désarroi du manque, puis confronte à la mort physique.

La situation de La petite fille aux allumettes appelant une identification du jeune lecteur au personnage sujet du récit, se développent de la sorte interrogation et empathie : pourquoi cette enfant est-elle seule, alors que je suis en famille ? Pourquoi avance-t-elle si peu vêtue dans le froid de l’hiver et sans repas possible, alors que je suis à table, dans la chaleur du foyer ? Pourquoi n’a-t-elle pas une maison où dormir ? Pourquoi ne lui offre-t-on pas de cadeaux ? Etc.

Entrer dans l’espace narratif d’Andersen implique donc incompréhension, culpabilité, et désenchantement de la fameuse « magie de Noël » dans laquelle nombre d’enfants sont bercés jusqu’à l’âge dit « de raison ». En ressort la fin de la croyance au Père Noël, qui non seulement coïncide avec la dissolution du conflit œdipien, mais entame également la découverte d’une capacité réflexive, puis la distinction du bien et du mal, du juste et de l’injuste, c’est-à-dire l’ouverture à une pensée dialectique et à une conscience critique.

Toujours est-il que cette conscientisation est fortement imprégnée, lors des fêtes de Noël, par les principes chrétiens. Le conte de La petite fille aux allumettes n’y échappe pas : il rappelle la fragilité de l’existence humaine, son incertaine condition, et invite à se soucier des défavorisés, tout en mesurant l’écart de ceux qui, par leur accès à une vie saine, en sont à la fois proches et séparés. Rappelons que l’adjectif « sain » ou « saine » est un homonyme de « saint » ou « sainte », et qu’il provient du latin sanus, au sens de bonne santé physique et mentale.

Or, loin d’adhérer à ce raccourci, la conscience, dont ce conte est le vecteur, tend à réfuter une distinction sociale établie par les élites bourgeoises. D’une part, parce que, fondée sur les apparences, cette distinction de classe provoque et légitime la parfaite indifférence de ceux qui se sentent du « bon » côté des choses. D’autre part, parce qu’ici, le confort des personnes les rend incapables d’appliquer les préceptes élémentaires de solidarité, dont néanmoins elles se réclament en célébrant leur foi, spécifiquement par la reconnaissance de la nativité d’un enfant pauvre, sauveur du monde4.

En soulevant ces paradoxes, Andersen indique que la valeur morale et spirituelle d’un être ne dépend pas de son bien-être matériel. L’écrivain accorde par conséquent à l’enfant des visions mystiques (la grand-mère est dite « bénie », tout comme le sapin, et l’enfant est finalement amenée au pays de Dieu5) auxquelles les autres personnages n’accèdent pas, puisque « personne ne sut les belles choses qu’elle avait vues, ni dans quelle splendeur, elle et sa grand-mère étaient entrées dans la joie de la nouvelle année6 ».


Une image archétypale

Mais d’où vient la « petite fille aux allumettes » ? Plusieurs éléments entrent dans la construction de cette image archétypale qu’il convient de relier à la tradition des colporteurs, dont la présence est attestée dans toute l’Europe dès le Moyen-Âge et croise l’histoire de l’usage du tabac, rapporté par les explorateurs du Nouveau Monde au XVe siècle7, de même que celle de la fabrication des allumettes. Les premières versions soufrées, inflammables au phosphore blanc, sont inventées par l’anglais Robert Boyle en 1680, puis sont perfectionnées en 1827 par John Walker et bien d’autres chimistes, français et allemands, par l’utilisation d’un système de friction et un contenant hermétique, ces allumettes portatives contribuant dans les villes à une forte expansion des fumeurs8. Il est intéressant de noter que l’allumette de sûreté (au phosphore rouge, moins dangereux et moins toxique) apparaît en Suède sous la forme de la boîte que nous connaissons, en 18449, précisément un an avant la rédaction du conte d’Andersen et sa parution dans un calendrier folklorique danois.

Des repères biographiques et iconographiques sont également à mentionner, dont le fait qu’en amont de l’écriture du conte, qui correspond à une commande, des images ont été présentées à Andersen par ses éditeurs. Parmi elles, l’écrivain choisit une gravure sur bois de John Thomas Lundbye figurant une enfant vêtue comme les jeunes travailleurs employés dans les fabriques d’Europe10, mais marchant la tête et les pieds nus, un balluchon suspendu au poignet droit, pendant que la main gauche tend une boîte d’allumettes cylindrique au-devant11. Les traits du visage de la fillette ne sont pas détaillés : de sa chevelure non peignée émerge un profil émoussé laissant deviner une moue boudeuse et un regard vide, incliné vers le bas. Une petite vendeuse d’allumettes est ainsi représentée, telle une figure anonyme rencontrée au coin des rues, comme c’est par ailleurs le cas pour l’écrivain, puisqu’à côté de sa maison, dans le renfoncement d’un mur, une enfant pauvre s’abrite régulièrement12.


Johan Thomas Lundbye, Petite marchande d’allumettes, gravure sur bois, 1843, d’après H.C. Henneberg, parue dans un almanach de fin d’année, édité par Flinch, gravure en accès libre, © Archives du Danemark, collections royales.  

Il faut aussi relever que cette gravure rappelle à Andersen la difficile enfance de sa grand-mère, souvent envoyée mendier et qui se réfugiait où elle pouvait, parfois sans même avoir de quoi manger. L’image est assurément chargée de mémoire et d’histoire ; elle l’est d’autant plus qu’elle symbolise la disparition progressive des métiers ambulants, au siècle de l’industrialisation, quand est recherchée une main d’œuvre agile et peu chère auprès des plus jeunes de la classe prolétaire émergente. Car cette image est aussi le témoignage criant de l’exploitation des enfants au XIXe siècle, fermement dénoncée par les écrits de Charles Dickens ou de Victor Hugo13 que le conteur connaissait. D’ailleurs, le personnage de la petite « Cosette » des Misérables de Victor Hugo, parus en 1862, n’est pas sans rappeler la petite fille qui nous occupe aujourd’hui : mêmes tâches indignes, même poids courbant le cou, même regard à une fenêtre regorgeant de belles choses pendant la soirée de Noël, mêmes vêtements en loques, même visage triste au regard absent14.

Mais, revenons au personnage du conte d’Andersen, dont les illustrations de Thomas Wilhelm Pedersen ont accompagné la première édition danoise en 1846 : de la description succincte que donne l’écrivain, de toute évidence inspirée par la gravure de Lundbye déjà citée15, l’illustrateur retient cette fois le tablier, la boîte d’allumettes (tenue désormais de la main droite), pendant que la main gauche cherche à se réchauffer sous le châle croisé. Les traits du visage, encadrés de cheveux blonds et bouclés16, sont tristes et fatigués, et la fillette, qui se tient devant le mur d’une habitation lézardée, est cadrée aux hanches et présentée selon les règles d’une scène de genre.

Thomas Wilhelm Pedersen [1820-1859], « La petite fille aux allumettes » (détails), dans Contes d’Andersen, traduits par Paul Leyssac, [première publication en France avec les illustrations originales de Pedersen [1846]], Paris Stock, Delamain et Boutelleau, 1930 (broché), 1934 (relié), domaine public, © Librairie Stock.   

Il ne s’agit donc pas d’un portrait visant à identifier une personne, mais plutôt de la déclinaison d’une figure symbolique qui, bientôt, se recroqueville « dans un coin, entre deux maisons […], ses petites jambes repliées sous elle17 ». Image et texte conduisent de cette façon le lecteur à comprendre les conditions de vie d’une enfant, dont la position n’est pas sans liens avec les représentations de la mélancolie ; schéma que retient notamment, en 1862, l’édition traduite en France par D. Soldi et illustrée par Bertall, qui témoigne d’une correspondance formelle manifeste avec la célèbre gravure de Dürer (1514).

À gauche, Hans Christian Andersen, Contes d’Andersen, traduits du danois par D. Soldi, illustrations de Bertall, Paris Hachette, 1862 (3e édition), p. 143, © BNF.À droite, Albrecht Dürer, Melancolia I, gravure sur cuivre, 1514, © BNF.   

En ce sens, l’histoire d’Andersen est sans équivoque, car, au terme d’une errance existentielle, elle décrit une prostration méditative, voire hallucinatoire, dont l’issue est fatale. Du reste, son recours, dans le fil narratif, à l’image de l’allumette qui s’allume, puis se consume, file la métaphore d’une vitalité physique et psychique s’éteignant peu à peu. On remarque en outre, dans les visions de la fillette, que les bougies du sapin de Noël se transforment en étoiles, et que l’une d’entre elles « tombe en traçant une longue raie de feu dans le ciel18 », ce que l’enfant interprète, en vertu des paroles de sa grand-mère, comme l’annonce de « quelqu’un qui meurt19 », mais que l’on peut également rapprocher du motif de la comète dans la partie gauche de la gravure de Dürer, dont la chute donne lieu à la présence massive du polyèdre20, sorte de contrepoids figural énigmatique qui, dans le dessin de Bertall, prend la forme d’une borne émoussée. Il y a là une sémantique de la descente, de l’abattement, de la désolation et enfin de l’inertie, traditionnellement reliés à l’automne saturnien21, dont le solstice hivernal marque la fin et donne lieu à des fêtes païennes – les saturnales – en lesquelles Claude-Levi-Strauss voit « de très vieux éléments et usages » qui auraient été ensuite christianisés afin de célébrer la période de l’avent, selon des rites contradictoires et opposés22.

Or, pour le personnage pétrifié du conte, l’espoir est visiblement relancé plus d’une fois par la simple possibilité de frotter une allumette et d’en accueillir l’étincelle qui est signifiante quant aux capacités d’émerveillement de l’enfance, tout comme elle symbolise les illuminations et la chaleur de la bûche du jul scandinave qui, autrefois, marquait la sortie des plus longues journées d’hiver. Mais, pour la Petite fille aux allumettes, la correspondance entre les scintillements observés au bout de modestes bâtons et les brillances festives qui luisent aux fenêtres des maisons ne fait que creuser un écart immense entre son existence précaire et solitaire et la richesse des familles et groupes sociaux établis, cet écart construisant, selon Simmel, à l’examen des pauvres, « une opposition fondamentale entre les catégories sociologiques et éthiques23 ».

S’il mobilise des éléments symboliques puissants issus de toute une tradition rituelle divergente ramenée à un monothéisme dominant, par la figure de la petite fille misérable, Andersen signale donc un clivage social, que le contexte de la difficile condition enfantine des classes populaires en Europe au XIXe siècle entérine. Mieux, grâce à la portée métaphorique de simples objets du quotidien – les toutes nouvelles allumettes à friction – il construit une image archétypale qui s’insère à la fois dans une lignée spirituelle (les bougies, les étoiles, le merveilleux) et ses célébrations bourgeoises (le repas fastueux, les beaux intérieurs, la décoration du sapin, les cadeaux), mais cette image présente aussi une filiation iconographique avec l’expression du doute, de la dépression, de la mélancolie, et d’une certaine manière, de la déraison. En cela, le conteur place le lecteur, au même titre que le personnage du récit, au centre d’un malaise, en lequel réside le cœur du problème que nous essayons de cerner.


Au cœur du malaise

Interfaces et limites, séparations et ruptures


Ce malaise, soulignons-le, provient en premier lieu du rapport implicite qui s’établit entre le visiteur du conte et la figure de la Petite fille aux allumettes ; rapport à la fois empathique et distant. Ainsi, la position de lecture d’un enfant, dans la chaleur de son lieu d’habitation, est-elle à mettre en parallèle avec celle de la fillette assise dans le froid hivernal, et réciproquement. S’y s’articule l’idée de passage d’une existence à une autre, passage provoquant pour le lecteur un sentiment de trouble, d’insécurité, voire de culpabilité face à l’exclusion du semblable.

De plus, les regards que lance la Petite fille aux allumettes sur et à travers les fenêtres des habitations (comme, dans les illustrations des versions ultérieures, sur les vitrines des magasins) en désignent, certes, la fonction d’interface entre un dehors et un dedans auquel elle n’accède pas, mais ils intègrent corollairement un mouvement plus subtil entre intériorité et extériorité du sujet, vie physique et vie psychique. Un mur proche de l’enfant peut dès lors devenir « transparent comme un voile24 », puis laisser percevoir un repas joliment servi, avant de retrouver son épaisseur « glacée25 ». Or, si ces éléments permettent de franchir les frontières du réel à l’imaginaire, ils n’en établissent pas moins les barrières vitrifiées d’une condition à une autre. Et quand bien même ils induisent un système réflexif, ils n’en provoquent pas moins une sensation inconfortable et un état de crise, au sens originel du mot grec Krisis qui signifie « séparation ».

Quant aux visions miraculeuses de la fillette, celles-ci n’arrangent rien, car, qu’il s’agisse de l’apparition incandescente d’un arbre sacré, d’une étoile filante ou encore de celle d’une grand-mère « toute brillante, douce et bénie26 » qui la prend par la main pour l’emmener au ciel, ces motifs issus des textes et de l’iconographie religieuse, notamment des populaires images pieuses, appellent avant tout des figures fantasmatiques nées de la perte, du manque, et annoncent la mort à venir. Ces visions sont donc à considérer comme les manifestations d’une schize, en laquelle la fillette tente de pallier le désarroi physiologique et affectif qu’elle ressent. Sur le plan médical, celle-ci entre par leur intermédiaire dans une pathologie sans issue, car la création d’une compensation merveilleuse, comme l’a clairement montré Clarissa Pinkola Estes, est absolument inefficace dans la réalité « gelée » du sujet27, d’où le fait que ce tableau hallucinatoire s’apparente ici à une phase délirante et à ce que le vocabulaire psychiatrique nomme explicitement (au moyen du préfixe « dé » issu du latin « dis », au sens d’une négation) : une compensation – ici fatale, parce que liée à la destruction des fonctions vitales par hypothermie.

Cet état de crise ne s’arrête pas pour autant au seul contexte du conte, puisqu’il abîme également le lecteur par le choc d’une mort injuste, en particulier au moment du renouvellement de l’année qui symbolise la naissance d’un enfant salvateur dans le calendrier chrétien. Andersen utilise donc un paradoxe destiné à frapper la conscience de ceux qui lisent cette histoire et à les malmener quelque peu. Une dynamique oxymorique infiltre alors tout l’écrit et y développe une puissance accrue.

Ambivalences et paradoxes

À cet effet, malgré ses allures de figure mariale, la grand-mère qui emmène l’enfant constitue un personnage ambivalent convoquant bien d’autres visages de vieilles femmes issus des contes et légendes profanes, à l’instar des ogresses qui empêchent le développement des plus jeunes ou des sorcières qui les punissent ou les empoisonnent. Cette « sénescence » à l’œuvre, pour le dire encore avec Clarissa Pinkola Estes, est problématique, car, comme le souligne cette dernière, si elle véhicule l’expérience, la dignité et les bons conseils des anciens, elle peut à tout moment basculer dans une pensée unique et des actions délétères qui détruisent l’enfance et en « gèlent » les capacités28. En tout cas c’est la thèse que retient la psychanalyste à propos du conte d’Andersen, dans la mesure où il prône une mort magnifique, comme seule issue, cela par l’intermédiaire d’une figure ambiguë. Et de fait, les arguments de Clarissa Pinkola Estes s’appuient sur les paroles de sa propre grand-mère qui racontait elle-même cette histoire (dont la tradition orale semble plus lointaine que l’écrit d’Andersen), en prenant soin de préciser qu’il « n’est pas bon de faire de doux rêves, par des temps difficiles29 ». La bienveillance n’est donc peut-être pas où elle semble placée, et les apparences sont ici trompeuses, tout comme la confiance que le lecteur enfant peut accorder dans le monde des adultes. Sur cette suspicion repose le conte, créant par ce biais un doute affectif vis-à-vis des proches et un sentiment de trahison à l’égard des valeurs qu’ils enseignent. Dès lors, à l’examen de l’attitude des badauds plus ou moins indifférents au sort de la petite fillesolitaire, comment un lecteur peut-il ne pas déceler dans leurs visages les expressions de ses proches en train de festoyer à l’heure où lui-même est désolé de la découverte de cette histoire et où peut-être des enfants ont faim dans le froid de l’hiver ? Et comment peut-il décemment se tourner vers la table de repas regorgeant de plats agréables, c’est-à-dire ressentir la chaleur du foyer, quand sa propre famille réserve la générosité des festivités de Noël à un entre-soi, sans autre charité que celle d’une bonne pensée sans doute un peu facile à l’égard de la pauvreté, précisément ce jour-là ? Comment peut-il être le bénéficiaire de multiples attentions et cadeaux, sans tristesse à l’égard de ceux qui n’en recevront pas ? Comment peut-il revêtir de beaux vêtements bien chauds, quand un autre n’en aura pas ? Car la force de l’écrit d’Andersen est bien de mettre en évidence un paradoxe émotionnel et éthique. Il y a là une impasse adressée au lecteur qui ne peut plus se réjouir, dès lors qu’il a aperçu les ombres des sapins, bougies et autres étoiles de Noël. C’est pourquoi il est en proie à un curieux syndrome, qui, comme l’indique l’étymologie du mot, est la conséquence d’un concours de circonstances venues frapper l’existence, ici d’une impossible insouciance, puisque s’y marque avec insistance le déclassement et la finitude de son prochain.

Alors bien sûr, la symbolique de la lumière, garante d’une vie spirituelle, peut sans doute atténuer dans la croyance la douleur du malaise ressenti. Mais, il ne s’agit que d’une image, dont la magie est poudre aux yeux, comme en témoignent les étincelles des allumettes qui se consument, parallèlement à la vitalité physique et psychique d’une fillette en errance. Et face à l’émerveillement de Noël, dont les décors ressortent chaque année, puis sont rangés au placard une fois les fêtes terminées, un sentiment de déception est à l’œuvre, dont le désenchantement est à coup sûr une épreuve. Au passage, l’enfant-lecteur s’est brûlé au « soleil noir » de la mélancolie30.



Adaptation, variations et transformations

Images à l’œuvre


Considérons toutefois que si bon nombre de versions restent fidèles à l’histoire proposée par Andersen, voire en étendent la portée, d’autres tendent à se tourner vers des adaptations moins sombres. Ces nouvelles formes voient le jour, en raison de la progressive prépondérance des albums illustrés et grâce à l’articulation de plus en plus soignée des images et du texte. À la fin du XIXe siècle, et jusqu’au milieu du siècle suivant, même si le schéma mélancolique défini plus haut semble continuer à fonctionner, la narration s’ouvre nécessairement à d’autres traductions visuelles, en lesquelles se révèle la plasticité des images, qui bientôt prennent le pas sur le récit, quitte à n’en retenir que quelques motifs symboliques.


Contes d’Andersen, traduits par Étienne Avenard, illustrations de Hans Tegner, Paris, Éditeur Felix Juven, s.d., avant 1900, p. 381. © BNF.   

Les illustrations deviennent, à ce titre, particulièrement opérantes à repérer les éléments-clés de l’histoire et à en souligner les principales étapes. Il suffit effectivement de feuilleter les nombreuses éditions du conte pour remarquer à quel point certains motifs de petites ou moyennes dimensions (en vignette, frise ou bandeau), sont, d’un ouvrage à un autre, bien souvent repris, jusqu’à parfois aboutir à des images en pleine page, dont certaines sont quelquefois retenues pour la couverture de l’ouvrage : ainsi en est-il de l’apparition de l’arbre de Noël, qui passe d’un simple sapin planté dans la neige à un arbre savamment décoré, dont les représentations rivalisent de splendeur. Mais cette « vision », imagée en 1862 par le danois Hans Tegner (dont les aquarelles sont reprises peu après en France sous forme gravée31) cristallise davantage l’attention autour des années 1910-192032, pour connaître son apogée dans les années 1950 à 197033, à une époque où les éditions enfantines accompagnent, lors des fêtes de Noël, une distribution pléthorique de cadeaux qui va de pair avec une ère de grande consommation. En toute logique, les illustrations de ces ouvrages sont si esthétiques que la pauvreté de l’enfant s’en trouve minorée, au profit des ornements, de vêtements enjolivés et d’une chevelure extraordinaire.


Contes d’Andersen illustré par Benvenuti, traducteur inconnu, S. l., Éditions Fabbri, 2e édition, 1966, p. 28-31. © Édition Fabbri-Hachette.    

De même, les hallucinations de l’enfant qui fixe la flamme des allumettes dans une sorte de transe sont-elles, à cette époque, présentées comme un jeu – le geste de frotter une allumette, somme toute magique, permettant de produire une image récréative34. Dans cette perspective, la figure de la fillette n’est plus montrée en souffrance, mais devient une poupée joviale qui vit les apparitions comme un amusement, ceci afin d’offrir au lecteur un joli divertissement avant d’aller dormir, ainsi que le suggèrent les albums Bonne nuit, à la lueur d’un visage de jeune fille qui ressemble curieusement à Brigitte Bardot35.

Il faut attendre les années 80 pour voir la question de la misère revenir au premier plan36, mais la grand-mère y est parallèlement valorisée dans toute son ambiguïté, en ce qu’elle assure un voyage au firmament, dont l’enfant ne revient pas, ou parce qu’elle revêt l’aspect d’une sorcière au nez crochu, comme celle que l’on trouve sur la couverture d’une édition antérieure des Deux coqs d’or37.

En France, il appartient à Georges Lemoine38 d’illustrer l’errance et la tristesse, tout en distanciant le merveilleux par des moyens graphiques. On note par exemple l’astuce de sa mise en page quand elle reprend le quadrillage de fenêtres à carreaux, dont le truchement parvient à établir une séparation efficace entre le vécu de la fillette et ce qu’elle croit voir, mais aussi entre le lecteur et l’enfant du récit. L’illustrateur s’emploie, de plus, à faire dialoguer certains contrastes véhiculés par le texte dont, par exemple, le feu incandescent de l’allumette en regard de la chute de neige – étincelles et flocons se répondant ou se confondant. Lemoine retient enfin la métaphore de l’allumette qui se consume, dont il dessine le processus de la première à la dernière page de l’album. Quant au texte, soigneusement adapté pour les plus jeunes, il prend également soin de séparer ce qui relève de la réalité de ce qui appartient au domaine de la pensée ou de l’imaginaire. Mais, les éditeurs, qui publient diverses versions, y compris au format poche, ont bien du mal à ne pas faire rêver les enfants à un paradis, où il fait toujours beau, et où personne n’a ni froid ni faim, cela par l’insert d’un visage d’enfant en gros plan parsemé de fleurs, censé recouvrir la face triste de l’enfant exclu sous la neige39.

N’oublions pas, cependant, qu’un autre médium permet d’illustrer ce conte en incluant ses parts fictionnelles, tout en restant à proximité du réel : il s’agit du cinéma. Sous le titre La Petite marchande aux allumettes, le film muet de Jean Renoir, en 192840, met ainsi l’accent sur les métiers ambulants, cette fois dans le Paris des années folles, sur fond de paupérisation des couches les plus modestes de la société. Le cinéaste choisit, par ailleurs, de mettre en scène une femme enfant qui évolue en fonction d’un scénario romancé. Ici, le charme de la jeune marchande incarnée par Catherine Hessling n’est pas sans faire écho à la figure de « l’allumeuse » aux mœurs légères si souvent illustrée par la représentation des actrices et des danseuses figurant sur les boîtes d’allumettes au tournant du XIXe siècle41. Par ce rapprochement, le cinéaste indique que la pauvreté est sans rempart face aux intentions douteuses auxquelles expose l’errance urbaine des jeunes filles avec, souvent, la prostitution pour seule issue. La fin du film, entièrement sous le joug de la destruction, est tout aussi tragique que celle du conte d’Andersen, mais l’espoir d’une résurrection de la nature y est présent, quand bien même il entretient le paradoxe de fleurir en hiver. À ce propos, il convient de remarquer combien la figure de l’oxymore y est encore active et à quel point la signification finale diffère du conte original, parce qu’ancrée dans le cycle du vivant, elle témoigne d’une résistance, dont le potentiel supplante la fatalité.

C’est, au demeurant, ce que retient en 1987 le film américain The Little Match Girl, qui offre une adaptation liée aux problématiques raciales des États-Unis42. Il est dès lors fort réjouissant que l’héroïne du film de Lindsay-Hogg soit incarnée par une petite fille noire accueillie par une riche famille d’entrepreneurs. Il est aussi particulièrement réconfortant que cette enfant arrive à infléchir la rigidité égoïste du maître de maison. Mais une certaine condescendance infuse le scénario et toujours une croyance en une bonne étoile trace le chemin de façon quelque peu illusoire.

Je passerai sur le film britannique de même date43, parce qu’il enfouit la misère sous le masque de la comédie musicale, tout en amalgamant d’autres figures, qui apparaissent dans les écrits d’Andersen, de Dickens ou de Victor Hugo, tels la bergère et le ramoneur, Oliver Twist ou Gavroche, accompagnés d’une bande de gamins gouailleurs. Or, si ces personnages valorisent le groupe social que constituent les pauvres, ils s’avèrent ici soumis à des gestes caricaturaux qui font oublier la solitude et les souffrances de l’exclusion, au profit de figures pétillantes, joyeuses, solidaires, à même de danser une vie qui fait fi des soucis. Autant dire que la mise en scène vise à ne pas choquer les jeunes spectateurs qui regardent par milliers ce qui relève évidemment d’une distraction mensongère.


Au tournant d’un XXIe siècle en crise, de nouvelles adaptations

Les années 2000 à aujourd’hui étant marquées par une succession de crises à échelle mondiale, l’histoire de la Petite fille aux allumettes résonne de plus en plus fort avec la réalité difficile de beaucoup d’humains. Aussi demeure-t-elle une référence sur laquelle s’appuyer et donne-t-elle lieu à de nouvelles reprises du texte d’Andersen, dans lesquelles il n’est plus question d’embellir la précarité ni la pauvreté, et encore moins la figure de la grand-mère, dont le rôle est bien souvent amenuisé, et même éventuellement réduit en fumée44.

Les albums des deux dernières décennies reviennent donc sur le contexte de l’errance et l’isolement de la fillette, dont les épaules sont abaissées, le dos vouté, l’allure grêle, le nez rougi par le froid, même si le personnage demeure auréolé de cheveux d’or45. L’idée est de présenter une figure fragile, toujours jolie, avec laquelle les enfants entrent en empathie. L’image de la blondeur de l’enfance y est par conséquent tenace, ce que corrige par exemple le Studio Walt Disney, avec la production, en 2006, d’un dessin animé46 qui suit de façon stricte le conte d’Andersen, à la différence près qu’il se situe en Russie et met en scène une petite bohémienne brune dans une ville dont l’aspect répond à une gradation subtile de tons gris, pendant que le jaune est réservé aux rares lumières qui en éclairent la nuit. Dans ce court film d’animation, seules les hallucinations possèdent une gamme chromatique étendue, si bien que les jeunes spectateurs ont la capacité de les différencier du contexte maussade et du désarroi, dans lesquels évolue la fillette. Roger Allers élabore de la sorte une représentation abstraite qui est aussi à l’œuvre dans le domaine de l’édition – qu’il s’agisse, par exemple, de mettre en scène des photographies avec des éléments simples du quotidien et des figures découpées, comme le fait Yveline Loiseur47, ou que le recours à un dessin plus élaboré soit, avec Kveta Pacovska48, au service d’images essentielles : la sensation du froid étant par exemple donnée par quelques couleurs signifiantes sur le travail au trait d’un pied nu ; la friction des allumettes étant indiquée par une tige associée à des frottements de pastels vifs sur le papier ; le lieu où l’enfant s’abrite étant matérialisé par un papier déchiré, rouge, apposé par des scotches sur la forme d’une maison grise, exactement comme on peut imaginer la Petite fille aux allumettes, telle qu’adossée, en souffrance, au mur d’une habitation triste et dans un contexte peu accueillant. 

L’arrivée de ces différentes formes conceptuelles est intéressante, car si elles stimulent l’imagination, souvent au détriment du texte, elles témoignent aussi très concrètement et selon des procédés sensibles d’une situation désastreuse vécue avec distance, voire indifférence, par les spectateurs de ce genre de scène devenue banale. Or, que savons-nous au juste des enfants, qui partout dans le monde et parfois à notre porte, dorment dans le froid de la rue ? Pourquoi sont-ils ainsi réduits à leur condition, de la même manière que la Petite fille aux allumettes est finalement réduite à sa seule boîte, dont l’objet, désormais, escamote la figure, le visage, et pour ainsi dire le sujet, dans plusieurs versions contemporaines49 ? Par réaction provient peut-être la proposition d’une histoire remaniée autour d’une « petite fille sans allumettes », comme le suggère Martine Delerm50. Petite fille qui aujourd’hui mendie dans les rues de Paris, en un temps où les allumettes ne servent qu’occasionnellement et ne peuvent se vendre à des fumeurs qui ne courent plus les rues. Encore s’agit-il de mentionner ici, la figure « Allumette » inventée par Tomi Ungerer51, qui est certes malmenée, mais qui, au contraire de se laisser réifier, se redresse et éclaire sa vie et celle des autres de son optimisme et de sa débrouillardise, comme de sa faculté à tisser des liens pour faire le bien.

Fait donc ici retour le nécessaire dépassement de la fable miraculeuse. C’est sans doute pourquoi, dans la version filmique que présente Marius Holst pour l’agence POL52, les hallucinations de la petite fille au visage sale et aux cheveux rasés ne sont que des clignotements imaginaires qui n’emportent pas l’enfant dans les bras d’un fantôme merveilleux. Il s’agit en effet, bien au contraire, de confronter les spectateurs, adultes et enfants, à la détresse dans laquelle se trouve un enfant pauvre, et à l’urgence d’y remédier. À la nuit tombée, une jeune femme vient donc parler à la petite fille sans domicile, lui donne une couverture et l’accueille pour prendre soin d’elle et la réconforter. Cette jeune femme n’est pas un fantôme, elle ne vient pas du cosmos, tout juste porte-t-elle un anorak bleu à l’imprimé étoilé. Comme l’équipe qui a travaillé au court-métrage, elle fait partie d’une association humanitaire, dont le mot d’ordre est « Save the children ». Souhaitons donc, avec ce film, à l’heure où la précarité est accrue chez les jeunes et les moins jeunes, mais aussi à l’heure où les réfugiés politiques, climatiques, économiques, tentent de prendre leur vie en main, parfois, en emmenant de très jeunes enfants, oui, souhaitons que les duvets et autres couvertures dorées distribuées dans les rues et aux frontières ne serviront pas à voiler des corps qui, dans le froid de l’hiver, sont réduits à des faits divers, désormais banalisés par les médias sur fond de black Friday, comme c’est le cas au moment où j’écris, le cœur serré, et alors que l’on entend ici et là les souhaits de bonnes fêtes ou d’un joyeux Noël pailleté.


1. Georg Simmel, Les Pauvres [1908], trad. Bertrand Chokrane, Paris, PUF, 1998.

2. Walter Benjamin, Enfance : éloge de la poupée et autres essais, [1911-1940], Paris, Rivages, 2011, p. 66.

3. Idem, p. 66-88.

4. « Noël » qui vient de « natale » est la « fête solennelle de la naissance de Jésus Christ célébrée dans toutes les églises chrétiennes depuis le IVe siècle de notre ère ». Elle succède à la fête païenne du solstice d’hiver. Voir Robert Cabié, « NOËL », Encyclopædia Universalis [en ligne], https://www.universalis.fr/encyclopedie/noel/.

5. H. C. Andersen, La Petite sirène et autres contes, trad. Régis Boyer, [sans illustrations], Paris Gallimard, 1994, p. 183-184.

6. Ibid., p. 184.

7. Voir Catherine Ferland, « Mémoire tabagiques. L’usage du tabac du XVe siècle à nos jours », dans Drogues, santé et société, vol. 6, n°1, 2007, [en ligne], <https://www.erudit.org/fr/revues/dss/2007-v6-n1-dss1891/016942ar.pdf>.

8. Voir Axel Benassis, « Allumettes de sûreté 0.35F. » dans Graphisme et philuménie, École européenne de Bretagne, 2015, [en ligne], <http://strabic.fr/Graphisme-Philumenie-matchbox-allumettes-de-surete-0-35f>.

9. Ibid.

10. Voir ici Johan Thomas Lundbye, « Petite marchande d’allumettes », 1843, dans SMK open, [en ligne],
< https://open.smk.dk/en/artwork/image/KKS8321a?q=lundbye&page=0&filters=creator%3AHenneberg%252C%2520H.%2520C>.
Cf. César Auguste Hébert, « Enfant de fabrique », dans Les Français peints par eux-mêmes : encyclopédie morale du XIXe siècle, t. 1, Paris, Léon Curmer éditeur, 1841, p. 262.

11. Il est opportun d’indiquer qu’à cette époque la boîte d’allumettes à friction portait le nom de « Lucifer », d’où le fait qu’elle soit portée par la main gauche et non la droite, laquelle est reliée aux gestes sacrés.

12. Hans Brix et Anker Jensen, « Biographie d’Andersen », in Les Contes d’Andersen commentés et annotés [1931], vol. 2, Éditeur Gyldendal, 1957, p. 207 et 213. Cf. Pierre Georget La Chesnais, Contes d’Andersen, op. cit., p. 281.

13. On pense par exemple à Olivier Twist de Dickens, qui paraît dès 1837. Remarquons ici qu’Andersen rencontre Victor Hugo à deux reprises en 1833 et en 1842. Et citons aussi le poème d’Hugo, « Melancholia » dans les Contemplations, Livre III, [1830-1843], Paris, Levy et Pagnerre, 1856, p. 203.

14. Voir Victor Hugo Les Misérables, Paris, Herzel et Lacroix, illustré par Brion, 1862, p. 208.

15. « Une pauvre petite fille marchait dans la rue pieds nus, tête nue […] Dans un vieux tablier, elle tenait une quantité d’allumettes et elle en avait un paquet à la main ». Cf. Andersen, La Petite sirène et autres contes, traduit par Régis Boyer, [sans illustrations], Paris Gallimard, 1994, p. 181.

16. Ibid.

17. Ibid., p. 182.

18. Ibid, p. 183.

19. Ibid.

20. Ce polyèdre serait ce qui reste de la chute de la météorite d’Ensisheim à laquelle Dürer aurait assisté, alors en compagnonnage dans la ville. Cf. Louis Barmont, Melancolia, L’Ésotérisme d’Albrecht Dürer [1947], Paris, Alcor éditions, 2019.

21. Sur ce sujet, voir Raymond Klibansky, Erwin Panofsky et Fraitz Saxl, Saturne et la mélancolie, Paris, Gallimard, 1964.

22. Claude Levi-Strauss, Le Père Noël supplicié [1951], Paris, Le Seuil, 2016, p. 29 et p. 44-45.

23. Georg Simmel, Les Pauvres, op. cit., p. 40.

24. H. C. Andersen, trad. Régis Boyer, op. cit., p. 182.

25. Ibid.

26. Ibid, p. 183.

27. Clarissa Pinkola Estés, Femmes qui courent avec les loups : histoires et mythes de l’archétype de la femme sauvage [1992], trad. Marie-France Girod, Paris, 1996, p. 437-449.

28. Id., « Les souliers rouges cousus main ; Piège n° 2 – la vieille femme sèche, la force sénescente », dans Femmes qui courent avec les loups, op. cit., p. 316-322.

29. Ibid., p. 437.

30. Julia Kristeva, Soleil noir : dépression et mélancolie, Paris, Gallimard, 1987.

31. Voir Andersen, « La petite marchande d’allumettes », in Contes d’Andersen, trad. Étienne Avenard, illustrations de Hans Tegner, gravées par plusieurs mains (Florian, Rousseau, Bauer, Closs, Jungt, Maté, Tresse, etc.) Paris, Éditeur Felix Juven, s.d., avant 1900, p. 381.

32. Id., Contes d’Andersen, texte adapté pour les enfants par Franck Nohain, illustré par O. A., Paris, Pierre Lafitte et compagnie, date s. d., [vers 1920], p. 103.

33. Id., Contes d’Andersen, illustration de Davanzo, Paris, Flammarion, 1951.
Cf. Id., Contes d’Andersen, illustrations de Benvenuti, Milan, Éditions Fabbri, 1958, réimpression de 1966, p. 28-31.

34. Voir Andersen, La Petite fille aux allumettes et autres contes d’Andersen, présentés et racontés par Jeanne Cappe, illustrés par Jean Léon Huens, Paris, Casterman, 1945, p. 5.
Voir aussi la pochette de H. C. Andersen, La petite fille aux allumettes [1845], raconté par Annie Ducaux de la Comédie française, illustration de Maurice Tapiero, éditions Lucien Adès, disque vinyle 45t, Paris, Société parisienne d’édition, Le Petit ménestrel, 1950.

35. Voir ici Andersen, La Petite fille aux allumettes [1845], trad. Soldi, illustré par Le Gwen, Paris, les deux coqs d’or, Éditeur Paul Durand, 1974.

36. Par exemple dans la version suivante : Andersen, La petite fille aux allumettes [1845], texte intégral établi par Christine de Cherisey, illustré par Toril Marö Henrichsen, Paris, les deux coqs d’or, 1985.

37. Il s’agit d’une version plus ancienne du même éditeur que cité précédemment, dont l’illustrateur, bien différent, n’est pas indiqué. Cf. Andersen, La petite fille aux allumettes, illustrateur inconnu, Paris les deux coqs d’or, 1980.

38. Andersen, La petite fille aux allumettes [1845],illustré par Georges Lemoine, [1988], Paris Gallimard, collection Folio cadet, 1988 et rééditions de 1990 et 1999.

39. Ibid., p. 27.

40. Jean Renoir, La petite marchande d’allumettes, 1928, film muet avec accompagnement musical (accordéon/ritournelle), 31 minutes 46, réalisé au Vieux Colombier.

41. Voir Alfred Choubrac, boîtes d’allumettes, Centre National du Graphisme, [en ligne], < https://www.centrenationaldugraphisme.fr/le-signe/collection/boite-dallumettes-illustree-par-alfred-choubrac>

42. Michaël Lindsay-Hogg, The Little Match Girl, téléfilm, 96 minutes, USA, 1987.

43. Michael Custance, The Little Match Girl, film de 80 minutes, Royaume-Uni, 1986.

44. Voir ici la couverture des « Étonnants classiques Flammarion ». Cf. Andersen, La petite fille et les allumettes et autres contes, trad. D. Soldi, E. Grégoire et L. Moland, Paris, Flammarion, 2e édition, [2002] 2014.

45. Voir Andersen, La petite fille aux allumettes, adaptation illustrée par Mayalen Goust, Paris, Père Castor, Flammarion, 2005, p. 3. Voir aussi la couverture de Andersen, La petite fille et les allumettes, [1845], trad. Grégoire et Moland en 1880, illustré par Fabrice Backès, Paris, édition des Ronds dans l’O, 2011.

46. Roger Allers, La petite fille aux allumettes, dessin animé de 6 minutes 24, Walt Disney Studios, 2006.

47. Yveline Loiseur, La petite fille aux allumettes, Pomponne, Transphotographic Press, 2013.

48. Andersen, La petite fille aux allumettes [1845], trad. Danièle Ball-Simon, illustré par Kvéta Pacovska, Paris, Éditions Nord Sud, 2005.

49. Voir, entre autres, la couverture au seul motif de la boîte d’allumettes de l’adaptation de Julie Annen, La petite fille aux allumettes, d’après Andersen, Paris, Lansman, 2015.

50. Martine Delerm, La petite fille sans allumettes, adaptation au contexte contemporain illustrée par l’auteur, Paris, Le Seuil, 2011.

51. Tomi Ungerer, Allumette [1974], Paris, L’École des loisirs, 2019.

52. Marius Holst pour l’agence POL, TM « Save the Children », The Little Match Girl, court-métrage, 2 minutes 16, Oslo, Norvège, 2020,[en ligne], <https://www.instagram.com/p/CIVOnd5AWda/>.