Littérature et Idée Mythopoétique Poétique du récit Espaces littéraires transculturels Perspectives critiques en littérature et poétique comparées Recherches sur la littérature russe Musique et littérature Observatoire des écritures contemporaines
Recherche par auteur étudié  :
Recherche par thème  :
Recherche dans tout le site :
COLLOQUES


SAGESSE DU ROMAN ? L'HÉRITAGE CRITIQUE DE MILAN KUNDERA


« L’homme fait des plans, Dieu rit ». Kundera et le roman comme « écho du rire de Dieu »

Frédérique LEICHTER-FLACK


Le roman, « écho du rire de Dieu » ? Célèbre est la formule de l’Art du roman qui établit un lien essentiel, définitionnel, entre ce que Kundera entend par la « sagesse du roman » et l’humour1. Pourtant, la métaphore choisie pour désigner ce lien est plus problématique qu’il n’y paraît. C’est elle que cet article voudrait interroger ici.

D’humour et de rire, il est beaucoup question sous la plume de Kundera : les titres de ses romans, de La Plaisanterie au Livre du rire et de l’oubli, en passant par Risibles Amours, en portent la trace explicite. Non seulement il y a toujours, ici ou là, une forme d’humour dans l’écriture de Kundera et dans le regard qu’il porte sur ses personnages, mais à de nombreuses reprises, dans ces passages où l’auteur reprend la parole pour commenter ce qu’il fait faire à ses personnages, il prend la question de l’humour et du rire comme objet de réflexion, de méditation ou de commentaire critique. Ainsi, la double page sur ‘les deux rires’, qui propose de distinguer un rire de l’ange et un rire du démon, dans le Livre du rire et de l’oubli, fait directement suite à la description et à l’analyse du rire attribué à deux étudiantes américaines qui préparent un exposé sur le Rhinoceros de Ionesco2. L’enchaînement est typique de la manière de faire de l’écrivain : une scène est fabriquée et prise en charge par la narration, puis l’auteur prend un peu de distance avec ses personnages pour interroger leurs faits et gestes, les commenter, en proposer une interprétation. C’est le moment où le rire des deux étudiantes, déjà décrit comme en excès, nous apparaît comme décidément très étrange. Et plus on l’examine, plus on fait effort pour l’écouter soigneusement, moins ce rire est drôle, plus il devient bizarre et dérangeant… L’article ‘rire’ du glossaire proposé dans l’Art du roman commente d’ailleurs ce qui se joue en raccourci dans l’épisode, soit la dissociation de la gaieté et du comique. Citant Gogol, Kundera rappelle que «si on regarde attentivement et longuement une histoire drôle, elle devient de plus en plus triste ». Et il ajoute : « l’Europe a regardé l’histoire drôle de sa propre existence pendant un temps si long que, au XXe siècle, l’épopée gaie de Rabelais s’est muée en comédie désespérée de Ionesco qui dit : “il y a peu de chose qui sépare l’horrible du comique” »3 

Les nombreux passages sur le rire et l’humour offrent largement de quoi reconstituer une philosophie de l’humour éparpillée au fil des romans et des essais de Kundera. Mais il y a surtout, dans ses romans, cet humour ravageur, sans mépris pourtant, qui, systématiquement, ramène au sol, avec une sorte de tendresse caustique, tous ceux que l’hubris de l’idéologie ou de l’exaltation lyrique avait emportés plus haut que de juste – un humour qui oblige les personnages à redescendre, et le lecteur à ne pas se payer de mots… Impossible, en effet, pour un personnage de Kundera de se prendre tranquillement au sérieux : il y a toujours un auteur pour l’observer, le scruter, l’examiner avec insistance de l’air railleur de celui à qui on ne la fait pas et qui ne lui laissera rien passer. L’humour à propos de ses personnages passe par ce regard constamment aiguisé de l’auteur en embuscade, ces observations permanentes de tout petits détails triviaux à qui la discrétion est refusée… On se rappelle par exemple la toque de fourrure de Clementis qui ouvre le Livre du rire et de l’oubli, que Kundera nous désigne avec insistance comme la seule trace qui reste de lui sur la photo retouchée d’où le personnage a été évincé après son expulsion du parti4.

Il faut encore mentionner le grotesque, la surenchère scatologique du dénouement de la Plaisanterie, qui n’est pas tant ‘plaisanterie’ par l’engrenage infernal déclenché par la carte postale de Ludvik à Marketa au début du roman que par l’échec ridicule et bouffon du plan de vengeance fomenté par Ludvik, quinze ans plus tard, quand il retrouve par hasard l’épouse de l’ancien étudiant responsable de son éviction du Parti et décide d’en faire sa maîtresse pour humilier et punir son ancien bourreau. Le projet de vengeance tourne court : on ne fait pas cocu celui qui ne rêve justement que d’un moyen de se débarrasser de sa femme. En guise de vengeance, Ludvik sert à Zemanek sur un plateau la solution que celui-ci n’osait espérer pour enfin écarter en douceur cette épouse encombrante. Et le ridicule contamine alors l’ensemble des acteurs involontaires de cette bonne farce du destin, quand Helena se suicide en croyant avaler des somnifères – en réalité des laxatifs dissimulés dans une boîte de somnifères5. Difficile, en vérité, de rire franchement d’un dénouement dont on ne sait plus très bien quoi penser et qui, par son caractère impitoyable, met mal à l’aise le lecteur : pour qui exactement est-il drôle ? Est-ce alors qu’il faut introduire dans l’histoire ce Dieu dont le roman serait un écho du rire ?

Ce très rapide parcours allusif au travers du comique kunderien nous a fait passer un peu vite sur l’étrangeté de l’expression « écho du rire de Dieu ». La métaphore ne va pas de soi. Qu’est-ce que c’est que ce Dieu qui rit dans un univers romanesque sans Dieu ? Et que signifie cet ‘écho’ ? S’agit-il pour le romancier de l’entendre avant les autres et de le transposer en roman ? Ou pour le lecteur, d’être capable d’entendre le rire de Dieu au travers de sa lecture ? Et surtout, que nous fait comprendre ce rire ?

L’étrange expression se trouve dans le « discours de Jérusalem », qui constitue la dernière partie de l’Art du roman. « Qu’est-ce que cette sagesse, qu’est-ce que le roman ? Il y un proverbe juif admirable : L’homme pense, Dieu rit. Inspiré par cette sentence, j’aime imaginer que François Rabelais a entendu un jour le rire de Dieu et que c’est ainsi que l’idée du premier grand roman européen est née. Il me plaît de penser que l’art du roman est venu au monde comme l’écho du rire de Dieu. »6 « L’homme pense, Dieu rit » : La traduction que Kundera donne du proverbe yiddish auquel il fait allusion convient parfaitement à sa conception du roman comme contradicteur parfait de toutes les vérités, de toutes les idéologies. Le non-esprit de sérieux du roman, c’est le combat de l’écriture romanesque contre les « agélastes », ceux qui ne savent pas rire, un terme que Kundera emprunte à Rabelais. 

Kundera poursuit en commentant l’usage qu’il veut faire du proverbe : « Mais pourquoi Dieu rit-il en regardant l’homme qui pense ? Parce que l’homme pense et la vérité lui échappe. Parce que plus les hommes pensent, plus la pensée de l’un s’éloigne de la pensée de l’autre. Et enfin, parce que l’homme n’est jamais ce qu’il pense être. (…) Il n’y a pas de paix possible entre le romancier et l’agélaste, insiste-t-il. N’ayant jamais entendu le rire de Dieu, les agélastes sont persuadés que la vérité est claire, que tous les hommes doivent penser la même chose et qu’eux-mêmes sont exactement ce qu’ils pensent être. (…) Mais le roman (…) c’est le territoire où personne n’est possesseur de la vérité »7. L’humour, pour Kundera, sert précisément à cela : à creuser la distance entre le vécu et son interprétation, à y insérer du « jeu », au double sens mécanique et ludique. Une autre métaphore célèbre vient compléter l’éloge du roman comme contradicteur de toutes les certitudes : « Le roman est né non pas de l’esprit théorique mais de l’esprit de l’humour. (…) L’art inspiré par le rire de Dieu est, par son essence, non pas tributaire mais contradicteur des certitudes idéologiques. À l’instar de Penelope, il défait pendant la nuit la tapisserie que des théologiens, des philosophes, des savants, ont ourdie la veille. »8

Ailleurs dans l’Art du roman, Kundera développe le portrait du roman comme art du « en même temps », en insistant sur la notion d’ironie romanesque, qui permet de secouer le joug de l’oppression du sérieux. En ne se laissant pas ramener à un seul régime de signification, et surtout, en ne se laissant pas attraper dans une seule et unique grille de lecture idéologique, le roman dit ceci et cela en même temps et d’un même geste. Et de donner l’exemple du roman de Cervantes – « critique rationaliste de l’idéalisme fumeux de Don Quichotte ? ou au contraire, exaltation de l’idéalisme ? Ces deux interprétations sont toutes deux erronées, parce qu’elles veulent trouver à la base du roman non pas une interrogation mais un parti pris moral. [...] Dans ce « ou bien ou bien » est contenue l’incapacité de supporter la relativité essentielle des choses humaines, l’incapacité de regarder en face l’absence de Juge suprême. »9 Trait définitionnel d’un genre ou mode d’emploi et programme de lecture ? Si l’ambiguïté demeure sous la plume de Kundera, son portrait du roman en genre idéal, bâti sur la filiation Cervantès-Rabelais-Sterne-Diderot a assurément diffusé l’exigence d’un régime de réception critique fondé sur un défi herméneutique dont toute une génération de professeurs de lettres, formée dans les années 1990, s’est avidement emparée. C’est dans la continuité de ce projet de lecture kunderien et de son mode d’emploi pour tirer des leçons politiques du roman, que se situe une large part de la critique éthique qui s’est déployée depuis.

Pourtant, si l’on comprend bien le rôle que Kundera attribue à l’humour comme ingrédient principal de la sagesse du roman, une petite anomalie vient fragiliser le dispositif. Mann tracht und Gott lacht, se traduit généralement non pas par « l’homme pense et Dieu rit », mais par « l’homme fait des plans et Dieu rit » : l’homme prévoit, échafaude des projets, réfléchit à des solutions, utilise son intelligence pour essayer de maîtriser son destin, pour contrôler ce qu’il lui arrive, mais c’est souvent en vain, car les choses sont incontrôlables… Le sens du proverbe yiddish que cite Kundera est donc plus près de « l’homme propose et Dieu dispose ». Mais alors, il devient plus difficile de l’entendre dans un sens souriant, et c’est là que commence son ambivalence sous la plume de Kundera.

À première vue, le proverbe pourrait sembler teinté d’amertume, de pessimisme, de cynisme même peut-être : on espère, on s’efforce, on planifie, on fait des projets… et puis tout tourne court. Il y a de l’imprévu, de la surprise, du hasard dans la vie, et cet imprévu ne tourne pas toujours en notre faveur. Dieu, qui le sait bien, rit de nos efforts. Non que ce Dieu dont il est question soit forcément un sadique qui s’amuserait à déjouer tous nos projets, à nous mettre des bâtons dans les roues et à nous priver des succès poursuivis. Dans une interprétation juive de ce proverbe, il n’y a aucune raison de croire en un Dieu qui s’amuserait sciemment à déjouer nos projets et à nous frustrer de nos espoirs, comme dans la vision grecque des divinités de l’Olympe. Ce serait plutôt un rappel salutaire, prudent, de la versatilité du destin, de l’incontrôlabilité des choses. Un Dieu plus sage que nous, qui connaît l’avenir, qui a plus d’expérience que nous de la vie, et qui sait que de l’imprévu peut toujours nous tomber sur la tête quand on s’y attend le moins, qu’on ne peut pas contrôler le futur et qu’il faut donc rester modeste et sur ses gardes, ce Dieu-là nous regarde nous échiner et voudrait nous prévenir par son rire de ne pas être trop sûr de nous. Il faut rester léger, mobile, adaptable, souriant malgré l’adversité… car le sort ne nous laissera pas forcément aller au bout de nos projets. La vie résiste à tous les plans qu’on trace sur elle. L’existence est comme un cheval fougueux qui n’en fait qu’à sa tête et qui ne se laisse pas dompter. On ne peut pas mettre le mors à son destin.

Si telle est la paraphrase judéo-compatible du proverbe correctement traduit (l’homme fait des plans, Dieu rit), le contresens de traduction que fait Kundera (l’homme pense, Dieu rit) est étrange non seulement parce qu’il tire le Dieu des juifs du côté des sceptiques, mais surtout parce que la traduction plus fidèle irait pourtant comme un gant à l’auteur de La Plaisanterie. Elle lui conviendrait même tellement mieux, pour caractériser l’esprit de ses romans à lui, qu’on pourrait se demander si cette traduction déviante n’est pas un lapsus cherchant à dissimuler le vrai point névralgique du roman selon Kundera : son rapport à l’aléa. Quelle meilleure illustration en effet, pour illustrer que « l’homme fait des plans et Dieu rit », que La Plaisanterie, cette histoire d’une vengeance qui tourne à la débandade, cette variation sur un arrosé qui cherche à devenir arroseur mais ne réussit qu’à se faire arroser à nouveau, cette parodie d’un Comte de Monte-Cristo sans grandeur ni gloire, défait in extremis dans un grand éclat de rire du destin ? Non seulement on ne peut pas se venger, non seulement on ne peut rien réparer, mais plus on essaie, plus le ridicule nous enfonce… Malheur aux vaincus ! Il n’y a pas de réparation possible pour les destins brisés. En réalité, avec la leçon ainsi commentée du dénouement de la Plaisanterie, nous sommes déjà bien au-delà de la sagesse yiddish du proverbe. Ce n’est pas simplement que les choses ne se passent pas comme on l’escomptait. Ce n’est pas simplement que le plan de vengeance est un pétard mouillé. C’est bien pire : c’est un pétard qui vous explose à la figure. Ce ne sont pas l’imprévu, la fantaisie, les surprises de la contingence irréductible, qui empêchent la réalisation des plans des hommes ; ce ne sont pas les facéties du destin…c’est son maléfice.

Il y a pourtant, sous la plume de Kundera théorisant l’art du roman à partir de sa lignée de romanciers préférés, de quoi alimenter une illustration plus légère du proverbe yiddish retraduit correctement. Cela passerait par ce trait caractéristique du roman quichottesque que Kundera, dans un entretien avec Christian Salmon reproduit dans L’Art du roman, appelle le vaudeville, avec tout son « appareil des coïncidences inattendues et exagérées », qui forme la trame du Don Quichotte, avec sa « taverne quelque part au milieu de l’Espagne où tout le monde, par pur hasard, se retrouve », dans « une accumulation de coïncidences et de rencontres totalement improbables ».10

Or, après Don Quichotte, le jeu des coïncidences improbables cesse d’être innocent ou ludique, il devient soit intentionnellement cocasse et parodique, soit fantastique et onirique, explique Kundera. L’illustration qu’il en donne porte sur le premier chapitre du premier roman de Kafka, Amerika. Pour Kundera, l’épisode du soutier, dans lequel le jeune Karl Rossmann, au moment de débarquer du bateau qui l’a mené en Amérique, retrouve par hasard son oncle d’Amérique le sénateur Jacob à l’issue d’une série de circonstances contingentes et de hasards improbables, fonctionne comme « un souvenir nostalgique de la taverne cervantesque »11. Mais il oublie, en évoquant Kafka et Amerika en particulier, de pousser plus loin encore l’analyse de l’altération de la caverne de Cervantes en direction d’une conception du destin (c’est-à-dire de l’intrigue) si facétieuse qu’elle en devient très éprouvante, cruelle, presque sadique, parce qu’elle ne laisse à ses personnages aucune échappatoire.

On pense par exemple à deux autres chapitres d’Amerika, qu’on aura du mal à trouver drôles, même s’il y est de fait aussi question de facéties du destin : le chapitre 3, ‘Une maison de campagne aux environs de New York’, repose sur le dispositif diabolique de la lettre que Mr Green, ami et émissaire de l’oncle Jacob, doit remettre au jeune Karl à minuit pile et par laquelle son oncle le répudie sans possibilité d’appel si la lettre le trouve loin de New York après minuit… alors même que Karl réclamait, depuis plusieurs heures déjà, de rentrer chez son oncle à New York et que c’est Mr Green, justement, qui l’a retenu dans cette campagne où le triste verdict va lui être rendu. Soigneusement ourdi par l’auteur, le piège du destin est un jeu malhonnête avec l’aléa et les contingences, une tricherie ; Karl Rossmann n’est d’ailleurs pas dupe : il confronte Mr Green à la duplicité dont il s’est rendu complice.

De même, encore un peu plus tard dans le roman, quand Karl est liftier à l’Hôtel occidental, il y a cette autre facétie maléfique du destin, orchestrée par l’intrigue dans « l’affaire Robinson », ce bref instant où le sort de Karl se joue quand, liftier modèle qui ne quitte jamais son poste, il doit s’absenter une petite minute de son poste pour porter secours au voyou ivrogne qu’un auteur malicieux ou malveillant a mis en travers de sa route ; et précisément à ce moment-là - encore une coïncidence - le chef des liftiers passe devant l’ascenseur, constate l’abandon de poste, et voilà Karl renvoyé sans possibilité de faire appel.

Si après Don Quichotte le jeu des coïncidences improbables ne peut plus être innocent, désormais, le hasard, relu au prisme du biais intentionnel, se fait cruel et maléfique. Et on peut continuer dans cette voie en sollicitant d’autres souvenirs littéraires, d’autres plaisanteries du destin de plus en plus diaboliques, de moins en moins innocentes. Ainsi de toutes ces intrigues qui échafaudent, à coups de hasards soigneusement fabriqués et de contingence artificiellement fomentée, un acharnement sur leurs personnages… C’est ainsi que fonctionne le Manteau de Gogol, qui met en scène, en la personne d’Akaki Akakievitch, un héros déjà frappé de toutes les tares, souffre-douleur de ses collègues et de la vie en général, qui a économisé sou à sou pendant des mois, rognant sur le plus indispensable au cœur de l’impitoyable hiver pétersbourgeois, pour acheter le nouveau manteau dont il a besoin pour prolonger son existence envers et contre toutes les difficultés, et qui se le fait voler le soir même du jour où il a enfin la joie de l’étrenner12

C’est encore ainsi que procède La Parure de Maupassant, l’histoire de cette jeune femme qui emprunte à une amie un collier pour une soirée, le perd, entreprend de le racheter à crédit pour pouvoir le rendre à son amie en dissimulant sa perte, et passe quinze ans de sa vie à épuiser ses forces dans le travail et les privations pour rembourser sa dette, avant d’apprendre, à la fin, de la bouche même de l’amie en question, une fois la dette remboursée et toute sa vie gâchée dans la misère, que la parure était en fausses pierres précieuses et qu’elle a été dupée par la vie.

Ce serait encore Jean de Florette et Manon des Sources de Marcel Pagnol, avec ce personnage du Papet qui, sans le savoir, en bouchant la source pour pousser à la ruine le nouveau propriétaire de la terre qu’il convoite, ourdit la mort de son propre fils naturel – et le comprend trop tard, quand il a perdu encore son neveu et seul héritier, qu’il avait embarqué dans cette conjuration. Ce pourrait être aussi le Roi s’amuse et Rigoletto, l’histoire terrible du bouffon qui découvre trop tard qu’il a commandité le meurtre de sa propre fille : déjà frappé par le malheur d’avoir sa fille séduite et violée par un roi sans principes, privé du fruit de la vengeance qui devait le consoler de sa première perte, le voici broyé par le destin qui retourne contre lui le plan fomenté pour demander justice à la vie…

Tous ces exemples de méchantes blagues du destin fabriquées par des auteurs démiurges posent la question de la frontière avec le tragique. On s’en approche sans doute, mais sans jamais pouvoir y gagner une consolation : car l’humour du destin est plus puissant qu’un oracle fatal comme celui qui frappe Œdipe. Davantage, même cette interprétation sous l’angle de la catégorie de tragique, qui pourrait offrir le réconfort d’une tradition glorieuse dans laquelle l’homme se retrouve certes brisé, mais par une force incommensurable, Kundera nous en déloge avant que l’on ne puisse y trouver refuge : une blague tragique, si épouvantable soit-elle, reste une blague quand même, comme le formule, de manière impitoyable, le chapitre de l’Art du roman consacré à l’essence du kafkaïen : « Le comique est inséparable de l’essence même du kafkaïen. Mais c’est un piètre soulagement [pour le personnage] de savoir que son histoire est comique. Il se trouve enfermé dans la blague de sa propre vie comme un poisson dans un aquarium ; il ne trouve pas ça drôle. En effet, une blague n’est drôle que pour ceux qui sont devant l’aquarium ; le kafkaïen, par contre, nous emmène à l’intérieur, dans les entrailles d’une blague, dans l’horrible du comique. Dans le monde du kafkaïen, le comique ne représente pas un contrepoint du tragique (le tragicomique) comme c’est le cas chez Shakespeare ; il n’est pas là pour rendre le tragique plus supportable grâce à la légèreté du ton ; il n’accompagne pas le tragique, non, il le détruit dans l’œuf en privant ainsi les victimes de la seule consolation qu’elles puissent encore espérer : celle qui se trouve dans la grandeur (vraie ou supposée) de la tragédie. »13

Mais si le diagnostic est juste, à quel jeu se retrouve-t-on alors à jouer, en tant que lecteur ? Quand le destin (c’est-à-dire, l’auteur bien sûr dans le roman) pousse la facétie expérimentale jusqu’à une cruauté presque insoutenable, quand la coïncidence s’emballe et tourne à l’horreur, sans que, pour l’observateur extérieur qui regarde le personnage se débattre dans les entrailles de la blague, cela ne cesse pour autant de solliciter notre sens de l’humour pour apprécier la valeur esthétique de cette coïncidence, comment réagir comme lecteur ? Quelle sorte de sagesse, si c’en est une, le roman nous enseigne-t-il alors ? Faut-il encore s’efforcer de goûter l’humour ? Ou devient-il acceptable, même en bon lecteur de Kundera, de se ranger parmi les agélastes en refusant de trouver cela drôle ?

Ainsi, comment faut-il donc réagir à la fin de la Plaisanterie, ce grand « roman de la dévastation », selon les mots de François Ricard14? Ce grand finale de larmes, de chiasse et de ridicule, est-il drôle ? Est-il atroce ? Peut-on en rire ? Ou serait-ce ajouter au malheur du monde ? Certes, c’est une gageure de conserver son sens de l’humour après avoir lu ce roman. Pourtant, il n’y a pas mort d’homme. Elle s’en remettra. Lui aussi. L’hubris, celle de la vengeance comme celle du sentiment, est rembarrée un peu brutalement, mais ce n’est pas une mauvaise chose… Peut-on alors prendre ce rire de Dieu, s’il est permis d’en entendre l’écho ici aussi, comme un message d’apaisement ? Personne n’en est mort, personne n’en mourra, vous non plus vous n’en mourrez pas, le malheur et les déconvenues de la vie, grandes ou petites, ne vous empêcheront pas de vivre ? Ou cet humour comme signe de grâce est-il un contresens complet ? Peut-on sincèrement réussir - mais au prix de quels renoncements alors ? - à trouver drôles le Kafka d’Amerika et le Gogol du Manteau ? Faut-il prétendre trouver, à la lecture de Kundera, une sagesse de l’humour face aux déboires et aux malheurs de la vie, face aux mauvaises blagues du destin, face à la malchance quasi métaphysique de ces tragédies du quotidien ?

Dans le choix d’en rire ou pas, de consentir au comique ou de lui résister, d’affronter les agélastes ou de se rallier à eux au motif qu’il y a des choses dont on ne peut pas rire sauf quand on n’a pas de cœur, de tendre l’oreille à l’écho du rire de Dieu même au cœur de l’épouvante ou de lui tourner le dos exaspéré par sa désinvolture qui bafoue la dignité humaine, il y a tout un débat à mener sur l’ambiguïté morale du rire… Et c’est encore Kafka qui peut nous y initier le mieux. Revenons en effet un instant de plus au « Soutier », le premier chapitre d’Amerika, et à son ton si particulier. Quand l’oncle Jacob raconte avec légèreté, pour égayer la galerie, les malheureuses aventures qui ont valu à son neveu Karl son renvoi de chez ses parents et son expulsion vers l’Amérique, n’est-ce pas le récit d’un viol qu’il fait sur ce ton plaisantin et badin ? Un viol qui, sur le moment, précise-t-il en riant, a arraché à Karl des « larmes de détresse »15 ? Sur quel pied prendre ce récit ? Participera-t-on à la rigolade générale ? Ou voudra-t-on jouer le rôle du rabat-joie moralisateur qui insiste pour qu’on montre un peu de respect pour le malheur de l’affligé ?

Davantage, toujours dans ce même chapitre, comment prendre ce procès improvisé pour harcèlement moral qui tourne à la débandade ? Quand Karl se prend d’amitié pour ce soutier qui se prétend discriminé, au point de se commettre d’office, avec ferveur, son avocat auprès du capitaine du bateau, sa passion pour la justice manque-t-elle d’humour ? Passe-t-elle à côté de la saveur comique de la scène, que tout le monde semble apprécier sauf lui ? Prend-il au sérieux, et même au drame, quelque chose qui ne le mérite pas ? Tous les autres personnages et témoins de la scène, après tout, ont l’air de trouver très drôle la plainte du soutier contre le contremaître Schubal… Même Karl Rossmann est obligé de le remarquer : des filles de cuisine aux autres machinistes, tout le personnel du bateau est venu au spectacle de la farce dans laquelle le malheureux plaignant s’enfonce avec l’aide de son jeune et naïf avocat… Alors, comment faut-il comprendre la scène du « Soutier » - une bonne blague ou une affreuse injustice dont tout le monde se gausse ? Quelle est la bonne lecture, et surtout, la bonne éthique de lecture ? Est-il acceptable de participer à la gaieté ambiante ou faut-il défendre de tout son pouvoir, sous les rires, la brûlure de l’injustice ? Les deux bien sûr, répondrait sans doute Kundera, puisque l’humour, constitutif de la sagesse du roman, est justement l’art du ‘en même temps’. Mais on est toujours sur un fil avec ce « mariage du non-sérieux et du terrible »16.

Dans les Testaments trahis, Kundera donne encore une autre définition de l’humour : « l’éclair divin qui découvre le monde dans son ambiguïté morale et l’homme dans sa profonde incompétence à juger les autres »17. De cette ambiguïté morale, un exemple très troublant est donné dans la première histoire qui ouvre le recueil Risibles Amours. La nouvelle est intitulée, justement, ‘Personne ne va rire’, et c’est sûrement la plus kafkaïenne de toutes les histoires de Kundera. « Personne ne va rire », raconte à la première personne l’histoire d’un universitaire, chercheur en histoire de l’art, qui se trouve sollicité par un fâcheux. Zaturecky – c’est le nom du fâcheux- veut faire accepter un de ses articles dans une revue qui le refuse et il a absolument besoin pour cela d’une recension positive de la part du narrateur. Mais celui-ci le fuit : trouvant mauvais l’article sur lequel on lui demande son avis, il veut s’éviter d’avoir à le dire en face à son auteur. Zaturecky insiste de toutes les manières possibles : il écrit, téléphone, se rend sur place à l’université ; à chaque fois le narrateur louvoie, lui fait répondre qu’il est absent, à l’étranger, pas joignable… Zaturecky qui a absolument besoin de cette recension et pense que c’est sa dernière chance d’être publié, vient le solliciter à domicile… c’est le jeu du chat et de la souris, un comique de répétition et d’absurde qui, à la limite du harcèlement d’une part, de la goujaterie de l’autre, commence à être un petit peu irritant, mais pas au point d’ôter au narrateur son sens de l’humour. Voici d’ailleurs qu’il a une bonne idée : il accuse Zaturecky d’avoir eu un geste déplacé et d’avoir cherché à profiter de la situation quand venu le trouver à son domicile la veille, il n’a rencontré dans l’appartement que Klara, sa jeune et jolie maîtresse, seule et en petite tenue. Voilà pourtant ce que la femme de Zaturecky ne peut lui laisser dire car cette calomnie risque de lui faire perdre son emploi. L’épouse entre dans le jeu à son tour pour défendre l’honneur de son mari, avec un acharnement redoublé par le sentiment d’injustice. La course poursuite reprend de plus belle.

Le narrateur a l’air de bien s’amuser, sauf que, comme souvent chez Kundera, les choses finissent par s’emballer. Peu à peu, le narrateur se prend les pieds dans la toile de mensonges, de calomnies, de faux-semblants qu’il a tissée pour se couvrir et échapper à la corvée que l’article de Zaturecky incarnait pour lui. Et c’est l’engrenage infernal : le comité de quartier, la petite amie, le département universitaire, tout le monde s’en mêle. L’affaire s’envenime, devient de moins en moins drôle et de plus en plus inquiétante, ou de moins en moins raisonnable et de plus en plus folle, c’est affaire de regard. Face à Klara qui prend peur et reproche à son amant de l’avoir embarquée malgré elle dans cette affaire, elle qui est fille de bourgeois et risque donc gros à voir son nom incidemment mentionné sur un procès-verbal de police, le narrateur répond que « le sens de la vie, c’est justement de s’amuser avec la vie, et que si la vie est trop paresseuse pour cela, il faut lui donner un léger coup de pouce »18. Le plus longtemps possible, même après avoir perdu son poste à l’université, puis son logement, et finalement jusqu’à l’amour de la jeune fille qui le quitte en lui déclarant brutalement ses quatre vérités, le personnage cherche à maintenir sa version de l’affaire : « tout ceci n’était qu’une blague », dit-il à Klara. Mais « l’époque n’est pas à la blague, on prend tout au sérieux par les temps qui courent », lui répond Klara. Et elle l’accuse, froidement, de n’avoir eu dans son jeu aucun égard pour les sentiments de Zaturecky et de sa femme, de les avoir manipulés tous deux pour la tenir elle sous sa coupe, et de l’avoir manipulée elle pour les contenir eux deux… Pour Klara, qui se rebiffe enfin, la formule « c’était pour rire », qui vise à s’épargner d’être jamais comptable de ses actes, n’est qu’une ruse de dominant, un instrument de pouvoir qu’il est grand temps de déconstruire et de dénoncer. On ne la lui fait plus.

Et à nous lecteurs ? Petit à petit, au fil de ce récit, nous avons basculé de l’insouciance ludique dans l’angoisse et le malaise – désirant secrètement, depuis un bon moment déjà, que le héros calme le jeu, cesse de plaisanter et rentre dans le rang. Quand Klara assène au narrateur, aussi nettement qu’elle le fait, ses quatre vérités, d’un ton moralisateur et péremptoire qui ne souffre aucune contestation, elle n’a aucun mal à nous emmener avec elle : nous sommes mûrs pour relire toute cette folle histoire en agélastes, pour y repérer, dès le tout début, sous la surface de l’humour et l’envie de jouer, l’irrespect et le manque de sensibilité aux autres, la cruauté égoïste et tous les ressorts de la domination sociale, à l’œuvre chez le narrateur.

Quelle lecture de cette affaire est donc la bonne ? « Mais quel délit, s’écrie le personnage principal ! j’expliquerai publiquement les choses comme elles se sont passées, si les humains sont des êtres humains, ils ne pourront qu’en rire ». À quoi son directeur de département à l’université répond : « Comme vous voulez. Mais vous vous apercevrez que les êtres humains ne sont pas des êtres humains ou que vous ne saviez pas ce que sont les êtres humains. Ils ne riront pas. » Et nous ? Acceptera-t-on d’en rire ? S’empêchera-t-on de le faire, convaincu comme Klara que l’humour est le voile que les dominants cherchent à tirer sur leurs ignominies ? Quand doit-on rire ? Quand doit-on juger, apprécier moralement ce qui se joue sous nos yeux, arbitrer ce qu’on a le droit de faire et de ne pas faire aux autres ? Si l’humour est « l’éclair divin qui découvre le monde dans son ambiguïté morale »19, y a-t-il un moment où il faut dissiper le brouillard de l’ambiguïté morale ? s’efforcer de comprendre les raisons de chacun, certes, mais juger quand même ?

À la fin de la nouvelle, le narrateur est intégralement défait, comme le lui fait remarquer Klara. Renvoyé de son poste universitaire, expulsé de son logement, il a tout perdu. Mais fidèle à la morale de l’humour, il reste fair play avec le destin. Il a joué, il a perdu, mais il reste joueur dans l’âme. Lui aussi, de l’intérieur de l’aquarium du comique, depuis les entrailles mêmes de la blague dans laquelle il s’est laissé enfermer, il cherche à entendre l’écho du rire de Dieu. Et à s’y consoler, en y trouvant malgré tout une forme d’émancipation heureuse, puisque, non, décidément, le rire de Dieu n’est pas le rire impitoyable du diable, ni le rire cruel des dieux de l’Olympe : « Il me fallut encore un moment pour comprendre que mon histoire (malgré le silence glacial qui m’entourait) n’est pas du genre tragique, mais plutôt comique. Ce qui m’apporta une sorte de consolation », conclut le narrateur de « Personne ne rira ».

Un compromis est-il possible ? Oui, il y avait de la cruauté dans sa manière de traiter Zaturecky, de l’égoïsme dans la manière dont il a usé de Klara, de la désinvolture dans son refus de reconnaître le problème qu’il posait aux autres. Mais pas seulement. Il y avait aussi un humour que seul le roman peut recueillir, à côté duquel il faut réussir, dans le quotidien de nos vies de plus en plus exposées, à ne pas passer. Un humour qui résiste obstinément aux assignations morales et aux significations politiques ? Rien n’est moins sûr, et il peut être très difficile de le lui accorder. Dans Les Testaments trahis, Kundera avertissait : « Ceux qui ne savent pas prendre plaisir à la scène où Panurge laisse les marchands de moutons se noyer tout en leur faisant l’éloge de l’autre vie ne comprendront jamais rien à l’art du roman »20. Et il concluait : « Le cœur serré, je pense au jour où Panurge ne fera plus rire »21. Nous n’en sommes probablement plus très loin.

Mais je voudrais pour conclure, tendre une perche au héros kunderien de « Personne ne va rire » pour l’aider dans son effort pour résister aux lectures moralisatrices en ajoutant un invité au panthéon littéraire de L’Art du roman. Tchekhov est l’auteur d’une nouvelle qui porte le même titre que le plus célèbre roman de Kundera : « Une Plaisanterie ». La nouvelle raconte l’histoire d’un jeune homme – le narrateur - qui emmène une jeune fille dévaler en luge à vive allure les pentes enneigées, et qui s’amuse, pour plaisanter, à chaque descente, à lui murmurer à l’oreille, au moment où la terreur de la vitesse lui fait perdre conscience d’elle-même et de ce qui l’entoure, « je vous aime, Nadia ». La jeune fille ne sait pas si elle a bien entendu ce qu’elle a entendu. Elle ne sait pas si c’est le jeune homme ou bien le vent qui lui murmure à l’oreille cette déclaration d’amour qui la fait chavirer. Mais c’est trop exaltant, elle ne peut pas s’en passer. Alors malgré sa terreur, elle recommence encore et encore à dévaler les pentes en luge. Pour entendre encore et encore, chaque fois, « je vous aime, Nadia », sans jamais réussir à savoir si elle a rêvé ces mots ou si c’est le jeune homme qui les lui a dits.

L’histoire est troublante. Au fond, n’est-ce pas l’histoire d’un jeune homme qui manipule les sentiments d’une jeune fille, se joue d’elle et de ses espoirs, et finit par s’en laver les mains complètement ? Mais tout l’art d’écrire de Tchekhov s’efforce de nous empêcher d’y projeter la lecture moralisatrice qui nous tente. « Comme nous allions ensemble à la patinoire, comment le vent lui apportait les mots “ Je vous aime, Nadienka ”, elle ne l’a pas oublié ; c’est maintenant pour elle le souvenir le plus heureux, le plus émouvant et le plus éblouissant de sa vie [...] Et maintenant que je suis plus vieux, conclut le narrateur, je ne comprends pas pourquoi j’ai dit ces mots, pourquoi est-ce que j’ai fait cette plaisanterie… »22 Et nous ? Comprenons-nous encore à quoi servent les plaisanteries ?

 

1 Milan Kundera, L’Art du roman, Œuvre II, Bibliothèque de la Pléiade, p. 740. Toutes les références qui suivent seront tirées de cette édition.

2 Milan Kundera, Le Livre du rire et de l’oubli, Oeuvre I, Bibliothèque de la Pléiade, p. 978-998 (troisième partie « Les Anges »), trad. F. Kerel revue par l’auteur.

3 L’Art du roman, Oeuvre II, op. cit. p. 732.

4 L’article de Marc-Emmanuel Melon, « La toque de Clementis sur la tête de Gottwald. Photographies truquées, mémoire manipulée et imaginaire littéraire » (Cahiers internationaux du symbolisme, sept.2009, vol 122-123-124, consultable en ligne sur http://hdl.handle.net/2268/27380) montre cependant que le trucage n’est pas tout à fait là où on le pensait, puisque l’épisode est inventé, pour servir de symbole, à partir d’une photographie réellement retouchée mais d’où Clementis n’a cependant pas entièrement disparu.

5 Sur La Plaisanterie, voir aussi l’analyse que lui consacre Alain Finkielkraut dans Un Cœur intelligent, Stock-Flammarion, 2009, chapitre « Le sage ne rit qu’en tremblant », p. 13-40.

6 Milan Kundera, L’Art du roman, op. cit., p. 740. Le « Discours de Jérusalem : le roman et l’Europe », septième partie de L’Art du roman, a été prononcé à l’occasion de la remise du prix Jérusalem à l’auteur le 10 mai 1981.

7 Ibid. p. 741.

8 Ibid. p. 741.

9 Ibid. p. 642.

10 Ibid. p. 699.

11 Ibid. p. 699.

12 Sur Le Manteau, je me permets de renvoyer à l’analyse que j’en fais dans Le Laboratoire des cas de conscience, Alma, 2012 (réédition Nuvis 2022), chapitre « Ni responsables, ni coupables. Autopsie d’un fait divers ».

13 Ibid. p. 705.

14 François Ricard, postface à l’édition de La Plaisanterie en folio Gallimard, repris dans Le roman de la dévastation. Variations sur l’œuvre de Milan Kundera, Arcades Gallimard, 2020. Voir également la lecture d’Alain Finkielkraut, op. cit.

15 Kafka, Amerika, chapitre 1 « Le Soutier », GF, trad. B. Lortholary.

16 Milan Kundera, Les Testaments trahis, « Le Jour où Panurge ne fera plus rire », Œuvre II, Bibliothèque de la Pléiade, p. 750. C’est à propos de la scène des moutons de Panurge dans le Quart Livre de Rabelais que Kundera propose cette expression.

17 Ibid., p. 770.

18 « Personne ne rira », Risibles Amours, Œuvre I, op. cit. p. 5-34, trad. F. Kerel revue par l’auteur. 

19 Ibid., p. 770.

20 Ibid. p. 751.

21 Ibid. p. 770.

22 Anton Tchekhov, Une Plaisanterie et autres nouvelles, Rivages poche petite bibliothèque, 2014, trad. B. Kreise.

 


___________________________________________________

- Auteur : Frédérique LEICHTER-FLACK
- Titre : « L’homme fait des plans, Dieu rit ». Kundera et le roman comme « écho du rire de Dieu »
- Date de publication : 27-08-2022
- Publication : Revue Silène. Centre de recherches en littérature et poétique comparées de Paris Ouest-Nanterre-La Défense
- Adresse originale (URL) : http://www.revue-silene.comf/index.php?sp=comm&comm_id=301
- ISSN 2105-2816